QUINZAINE CONSACREE AUX VICTIMES DU MENSONGE, DE L’INJUSTICE ET DE L’IMPUNITE
Le Lt Colonel Cyriaque HABYARABATUMA est un ancien officier des ex-FAR (ex-Forces Armées Rwandaises). Il a été arrêté arbitrairement le 06/02/2004 par un tribunal GACACA de sa région natale à Gikongoro.
En effet, le 6 février 2004 il était commissaire Général adjoint de la Police Nationale chargé alors des questions juridiques. Il est actuellement incarcéré à la prison centrale de Karubanda à Butare.
Selon les autorités judiciaires, il serait suspecté d’actes de massacres à grande échelle et de génocide commis dans la province de Butare. Ces actes comprendraient notamment l’assassinat, l’association ou la formation d’associations de malfaiteurs, la distributions d’armes à feu, etc (d’après le journal gouvernemental IMVAHO nshya n°1536 du 16-22 février 2004).
Pourtant le Lt Colonel Habyarabatuma avec le préfet Habyarimana J.Baptiste, assassiné en 1994, ont toujours été considérés comme des personnes qui ont protégé la province de Butare. Le génocide n’a pu commencer que deux semaines après les autres provinces, juste après la mutation du Lieutenant colonel Habyarabatuma et l’assassinat du préfet Habyarimana.
Les véritables raisons de son emprisonnement sont politiques car on le soupçonne qu’il ne soutient pas la politique de terreur du régime Kagame, surtout après la fuite et l’exil en Suisse de ses trois anciens collègues des ex-FAR. Ces derniers se sont enfuis le 30 mars 2003 : Le Général Major Habyarimana Emmanuel, le Colonel Ndengeyinka Balthazar, le Lieutenant Ndayambaje Alphonse.
ANTECEDENTS :
Depuis la victoire militaire du Front Patriotique Rwandais, les nouvelles autorités rwandaises, appuyés par quelques hauts officiers intègres des ex-F.A.R. (Forces Armées Rwandaises), ont lancé un appel aux membres des ex-FAR qui voulaient intégrer l’APR (Armée Patriotique Rwandaise: nouvelle armée du FPR) de revenir au Rwanda pour reconstruire leur pays dévasté par la guerre et les massacres.
A cette époque, c’est le Major CYIZA Augustin (Ancien Président du Conseil de guerre) qui accueillit les premiers militaires FAR qui répondirent à cet appel. Ils furent acheminés dans les centres de formation comme le camp militaire de GAKO et au nouveau Centre de formation militaire de RUBONA (en préfecture Butare) pour une formation idéologique et apprendre une nouvelle façon de “défiler ou de marcher”. Au niveau des stratégies et techniques de guerre, ils n’ont pas appris beaucoup de choses.
Deux cérémonies d’intégrations d’anciens militaires ex-FAR ont eu lieu en 1995
Le 25 Janvier 1995 à GAKO (dans le Bugesera au sud-est du pays) il y eut une grande parade militaire et des cérémonies “très médiatisées” pour célébrer ce qu’on a appelé l’intégration des ex-FAR dans l’Armée Patriotique Rwandaise (APR). Des discours furent prononcés et tous rentrèrent plus ou moins “satisfaits mais préoccupés” de savoir si les discours seront traduits dans les faits et les comportements. Les Colonels NDIBWAMI et GATSINZI ont été “nommés” respectivement : Chef d’Etat-Major de la Gendarmerie et Chef d’Etat-Major Adjoint de l’APR. Quelques autres anciens officiers ex-FAR ont été “éparpillés” dans des bureaux et à des “postes” purement “honorifiques” où toutes responsabilités et prérogatives leur sont refusées.
Le 9 Septembre 1995 à BUTARE (dans le sud-centre du pays): 1.300 militaires des ex-FAR dont cinq (5) officiers supérieurs, treize (13) officiers et un (1) spécialiste de la marine ont été “intégrés” dans l’APR. Selon le journal de l’APR “Ingabo n°4, de sept.1995, page 23”, les différentes personnalités qui ont pris la parole, ce jour-là ont félicité les militaires qui se sont désolidarisés des génocidaires. Le Colonel Balthazar NDENGEYINKA “a été nommé” chef militaire du Secteur militaire de Gitarama-Kibuye; le Lieutenant Colonel Laurent MUNYAKAZI “a été nommé” chef du Bataillon 35 de l’APR.
D’autres hauts officiers ont été “casés” dans des postes où ils se demandent “ce qui se passe et ce qu’ils doivent faire” dans cette armée! Une armée qui ne semble pas être “une armée nationale” mais une armée “au service des cliques extrémistes tutsi”. En effet “ces cliques” se définissent comme suit: une clique des “ougandais” (anciens exilés venus de l’Uganda), une clique des “Burundais” (venus de Bujumbura-Burundi) et une petite et trop faible clique de “rescapés tutsi” qui est souvent manipulée, utilisée et exploitée pour des intérêts socio-politiques et socio-économiques du “pouvoir occulte” des chefs militaires et politiques extrémistes. La clique des “laissés pour compte” composés d’exilés tutsi venus du zaïre “les banyamulenge” et la plus défavorisée s’est “taillée” une part de lion dans la Magistrature largement “purifiée de ses anciens éléments hutus”.
Nous vous renvoyons consulter le Mémorandum publié le 14 avril 1999 par le CLIIR sur le sort des ex-FAR intitulé : « Rwanda: PLUSIEURS MILITAIRES EX-FAR ONT ETE TUES, PORTES DISPARUS, EMPRISONNES SANS ENQUETES et SANS “DOSSIERS JUDICIAIRES et SOUVENT VICTIMES DE MACHINATIONS”.
Chapitre I : Premières arrestations et emprisonnements arbitraires des militaires “intégrés” dans l’Armée Patriotique Rwandaise (APR) :
Le 7 Février 1995 (soit 15 jours après les “fameuses cérémonies d’intégration”), plus de 110 militaires FAR furent enlevés du Camp militaire de GAKO (préfecture de Kigali-rural, au Bugesera dans le Sud-Est du Rwanda) et conduits vers une destination inconnue jusqu’au 19 février 1995. Il s’agissait de plus ou moins 30 officiers et sous-officiers et de 80 soldats des ex-FAR dont les épouses n’arrivaient plus à retrouver leurs traces, malgré leurs interventions auprès des autorités militaires et civiles.
Le 19 Février 1995, les épouses des militaires FAR disparus ont décidé d’alerter les Associations locales des droits de l’homme. Après plusieurs recherches, les militaires disparus furent localisés dans la prison de RILIMA (située à +/- 15 km du camp Gako) vers le 24 février 1995, suite à une descente d’une mission d’enquête du CLADHO (Collectif des Ligues et Associations des Droits de l’Homme au Rwanda) dans le Bugesera. Lorsque la Délégation du CLADHO se présenta le 24 février 1995 au Camp militaire de Gako et à la Prison de Rilima, les responsables militaires et pénitentiaires ont évité tout contact avec la dite délégation en prétendant qu’ils sont “en déplacement”. La délégation n’a pas pu non plus rencontrer leurs adjoints “qui ont prétendu être absents” à leur tour. Cette fuite de responsabilité s’expliqua par après, lorsqu’il devint clair que plusieurs de ces militaires étaient détenus sans “enquêtes et dossiers judiciaires” jusqu’aujourd’hui.
Les emprisonnements des militaires ex-FAR “intégrés” se sont généralisés
En Novembre 1995 (soit 10 mois après la 1ère intégration et 2 mois après seulement la 2ème “intégration”, ils étaient plus de 600 militaires ex-FAR détenus au Bugesera dans le camp militaire de Gako et à la Prison de Rilima où ils attendaient un hypothétique procès, d’autant plus qu’ils n’avaient subi aucune interrogatoire. Ils avaient été arrêtés sans enquêtes et restaient “détenus” sans aucun dossier judicaire depuis neuf mois!
La plupart de ces 600 ex-FAR emprisonnés sont des “jeunes officiers” qui ont terminé les études universitaires ou l’Ecole supérieure militaire. Certains ont même été formés dans les grands Ecoles militaires en Occident. Le Centre dispose de quelques noms dont 23 officiers.
Le 13 Janvier 1997 (soit deux ans après la 1ère “réintégration”), le Centre a reçu une information fiable faisant état des mauvaises conditions de détention de près de 1000 militaires des ex-FAR “réintégrés” dans la Prison Militaire de KIBUNGO (à l’Est du Rwanda). Cette prison serait occupée également par environ 3000 (trois mille) soldats de l’Armée Patriotique Rwandaise arrêtés pour plusieurs délits. Tous ces militaires ont été emprisonnés d’abord à la prison de RILIMA, puis transférés à la Prison de KIBUNGO.
Les prisonniers militaires de l’APR reçoivent leurs salaires et peuvent se rendre au marché chaque mercredi. Ils peuvent s’acheter de la bière et il y en a qui fument du chanvre.
Des informations dignes de foi font état des mauvais traitements inhumains et dégradants que ces prisonniers militaires de l’APR font subir à leurs collègues des ex-FAR qui ne bénéficient pas des mêmes avantages qu’eux.
Cette situation n’a pas changé et mérite la publication d’un nouveau Mémorandum sur le sort actuel des anciens militaires des Forces Armées Rwandaises (FAR) vaincues en 1994.
Fait à Bruxelles, le 30/11/2017
Joseph MATATA, Coordinateur du CLIIR