Un criminel notoire devient Ministre de l’Administration Locale dans le nouveau gouvernement rwandais
Le Centre de Lutte contre l’Impunité et l’Injustice au Rwanda (CLIIR)* dénonce et condamne la nomination du plus criminel des idéologues de la politique d’extermination du Front Patriotique Rwandais (FPR), Monsieur Protais MUSONI. Le CLIIR exige sa démission immédiate et son remplacement par une autre personne qui n’a pas du sang sur les mains.
Dans le nouveau gouvernement rwandais, annoncé le 29 septembre 2004 et composé de 18 ministres, dont quatre femmes et 11 ministres d’État ayant le rang de secrétaires d’État, Monsieur Protais MUSONI devient Ministre de l’Administration Locale et remplace le ministre hutu Christophe BAZIVAMO qui remplace à son tour un autre ministre hutu, Jean de Dieu NTIRUHUNGWA, au Ministère de l’Intérieur (Affaires internes).
Tout en comptant sur son habituelle machine à tuer que sont la Directorate of Military Intelligence (DMI), la Police Nationale et les Local Defense Forces (LDF), le président Paul KAGAME vient de renforcer sa plus puissante et efficace « machine à moudre et à saigner » tous ceux qui contestent sa politique d’extermination, d’exclusion, de mensonges, de pillage et d’asservissement (Voir le discours de Paul Kagame du 31/03/2003 à Bwisige, Byumba).
Monsieur Protais MUSONI fait partie des plus idéologues purs et durs du FPR, partisans de la solution finale pour régler la question de la majorité numérique des hutus perçue par eux comme un problème. Ces extrémistes tutsi ont déjà expérimenté des stratégies suivantes :
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inviter les populations dans des réunions publiques où ils se font massacrer en masse.
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déshumaniser, diaboliser et terroriser les HUTUS en les traitant globalement de génocidaires. Les emprisonner pendant plus d’une décennie sans dossier judiciaire. Exploiter le génocide rwandais à des find sociopolitiques et socio-économiques ;
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appauvrir la population par les expropriations et des répartitions injustes de propriétés agricoles, par la destruction forcée des maisons d’habitations. La villagisation forcée a ainsi déstabilisé la production agricole et provoque des famines incessantes ;
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provoquer la faillite des opérateurs économiques rescapés du génocide et les remplacer par les anciens exilés tutsi (autorisés à squatter les biens d’autrui) et les hommes d’affaires étrangers (sud-africains, hindous, pakistanais, occidentaux, etc…). Les plus grands commerçants hutu et tutsi sont exclus de la vie économique.
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Terroriser les opposants politiques et museler la société civile pour fermer toutes les espaces de dialogue et provoquer des révoltes qui seront réprimés dans le sang ;
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Réinstaurer l’esclavage des populations HUTU par les Travaux d’Intérêt Général (TIG) à l’aide des procès inéquitables dans les GACACA et les tribunaux. Pour ce faire, les syndicats de délateurs, encouragés par le pouvoir, travaillent à plein rendement.
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Pratiquer l’exclusion et le sectarisme sur base ethnique tout en niant et en supprimant les ethnies dans les cartes d’identité.
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Exercer un chantage permanent sur les institutions de l’ONU (dont le TPIR) et sur la communauté internationale ;
Monsieur Protais MUSONI a couvert les crimes suivants à Kibungo :
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En tant que préfet de Kibungo, Protais MUSONI est l’idéologue machiavélique du FPR qui a expérimenté les sites crématoires installés dans la Papeterie de Zaza (Kibungo) où des dizaines de milliers de cadavres de hutus ont été brûlés à partir de mai 1994.
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Il fut le premier préfet du FPR a expérimenter les premiers « tutsilands » et l’extermination systématique des populations indésirables par les massacres massifs, par l’appauvrissement programmé (les paysans n’ont pas pu échanger leur argent lors du remplacement de la monnaie en janvier 1995), par de l’expropriation et la villagisation forcée, par la répartition forcée et injuste des terres fertiles, etc. La préfecture de Kibungo, considérée longtemps comme le grenier du pays en produits vivriers de base (bananes, sorgho, manioc, haricots, légumes notamment les tomates, etc), est devenue aujourd’hui une région pauvre et affamée.
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Ce préfet fut le premier idéologue du FPR qui mit en pratique la politique d’extermination des populations hutu et tutsi de cette vaste région.
Qui est ce nouveau Ministre de l’Administration Locale ?
Monsieur Protais MUSONI est un ancien Commissaire à la Mobilisation du FPR pendant sa guerre pour le pouvoir contre le régime du président Habyarimana assassiné avec ses proches collaborateurs dans l’attentat terroriste du 06/04/1994, et dans lequel a péri l’équipage français de l’avion présidentiel abattu de retour d’une réunion à Dar-es-Salaam.
Ce fils de cultivateurs est motivé par les honneurs et l’argent et c’est par la corruption et l’assurance de rester impuni que le général Paul KAGAME le tient et l’utilise.
Monsieur Protais MUSONI fut nommé préfet intérimaire de la riche et vaste préfecture KIBUNGO dès sa conquête par le FPR fin avril 1994. Il fut le premier chef politique du FPR qui accompagna dans ses massacres les troupes du FPR commandés par le Colonel Fred IBINGIRA (promu aujourd’hui au grade de général et nommé Commandant de la 1ère Division des Forces Rwandaises de Défense (FRD) anciennement appelées Armée Patriotique Rwandaise (APR).
Pour continuer l’extermination des ressortissants de Kibungo et faire la place pour les anciens exilés tutsi rapatriés d’Ouganda, de Tanzanie et du Burundi, Monsieur Protais MUSONI, n’a pas lésiné sur les moyens les plus macabres. Il fut le premier à multiplier les milices tutsies du FPR pour renforcer les anciennes brigades clandestines du FPR dont une partie avait été décimée pendant les massacres et le génocide rwandais. Ces milices, renforcées et équipées de mitraillettes, de grenades, des poignards, de gourdins et de petites houes usagées (udufuni), furent déployées dans toute la préfecture de Kibungo et dans ses environs pour faire la chasse aux intellectuels, commerçants et paysans progressistes hutu qui n’avaient pas pu fuir vers la Tanzanie ou le Burundi. Aujourd’hui, cette préfecture compte des dizaines de milliers de victimes massacrés par les troupes du Colonel Fred IBINGIRA et les milices tutsi du préfet Protais MUSONI.
En plus des crimes de génocide et des crimes contre l’humanité, le nouveau Ministre Protais MUSONI, a occupé plusieurs postes de responsabilités où il s’est acquitté de son rôle néfaste de faire disparaître des personnes indésirables pour le FPR.
En 1998, il fut nommé Préfet de la Préfecture de la Ville de Kigali (PVK) pour combattre de prétendus « infiltrés hutu » dans la capitale rwandaise où de nombreux ressortissants des préfectures du nord Ruhengeri et Gisenyi furent enlevées et portées disparues à Kigali.
Dans son communiqué n°40/98 du 02/09/1998, notre Centre a dénoncé les enlèvements, les disparitions, les rafles massives et les enrôlements forcés de civils opérés par La police dans la ville de Kigali sous la responsabilité du préfet Protais MUSONI :
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Le 21 juillet 1998, Monsieur Pascal Hitimana, Directeur administratif à l’OCIR-Thé, a disparu en se rendant tôt le matin à son travail ;
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Le 21 août 1998 vers 7h15, Monsieur Ignace KANYABUGOYI, Directeur administratif de l’usine de fabrication de savons, SULFO Rwanda, a disparu alors qu’il se rendait en voiture à son travail. Il réapparut infirme deux ans plus tard. Un autre employé de SULFO, Monsieur Emmanuel TUYIZERE, a disparu à la même époque.
Des rafles, qui commençaient aux environs de 4 heures du matin, ont frappé plusieurs quartiers de la ville de Kigali :
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Le 23 août 1998, l’armée et la police ont enlevé 174 personnes dans le secteur GASYATA et les a embarquées vers une destination inconnue ;
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Le 25 août 1998, une grande rafle a été opérée de nouveau dans les secteurs GASYATA et GISOZI. Les personnes raflées, dont le nombre reste inconnu, ont été rassemblées à Remera dans le camp de la police.
Pour se moquer de la population rwandaise, au lieu de faire juger les crimes de génocide de son protégé, le général Paul KAGAME nomma son plus puissant idéologue comme Secrétaire d’État à la Bonne gouvernance en 2003.
Des préfets et autres autorités locales ont été assassinés pour avoir protégé la population et refusé de couvrir les massacres du FPR comme ceux opérés par Monsieur Protais MUSONI :
Dans ses différents communiqués, le Centre de Lutte contre l’Impunité et l’Injustice au Rwanda a toujours dénoncé l’assassinat ou la disparition des préfets, sous-préfets et bourgmestres hutu qui furent la cible privilégiée de la Directorate of Military Intelligence (DMI). En effet, le général Paul KAGAME et ses chefs militaires n’acceptent pas que les autorités locales protègent la population. Voici quelques cas recensés depuis 1995 :
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En Mars 1995, le Bourgmestre de GIKORO, TWAHIRWA Néhémie (du parti MDR) fut porté disparu près du marché de Rugende en Commune Gikoro (préf. Kigali-Rural).
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Le Préfet de Butare, Pierre Claver RWANGABO, assassiné près de Butare dans la nuit du 4 au 5 mars 1995 avec son fils aîné et son chauffeur. Curieusement son escorte a survécu.
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Le Bourgmestre de GISHOMA (Cyangugu), Théophile RUBANGUKA, emprisonné arbitrairement en Novembre 1994, est mort mystérieusement à la prison de Cyangugu. Le Conseiller communal du Secteur Gisagara, qui le remplaça, fut assassiné en Mars 1994 par des tueurs non identifiés et apparemment insaisissables!
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Le S/Préfet KOLONI Placide assassiné et brûlé avec sa femme, ses 2 filles et sa domestique dans la nuit du 27 au 28/07/95 vers 22h alors qu’il habitait près d’un campement de l’APR.
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Le S/Préfet de Gikongoro Oreste HABINSHUTI fut tué le 1/08/95 après avoir été conduit par un militaire de l’APR.
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Dans la nuit du 11 au 12 septembre 1995, le Bourgmestre de KANAMA (Gisenyi), Célestin SETAKO, son Conseiller communal du Secteur Kayove, Abraham Rukebesha, ainsi que plus de 110 paysans hutu (des secteurs Bisizi et Kayove) furent massacrés par l’Armée Patriotique Rwandaise (APR), sous prétexte qu’un des leurs, le Lieutenant RURAZA J.Claude, avait été tué dans une embuscade tendue par des “éléments non identifiés”!
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Dans la nuit du 10 au 11 mai 1996, le Bourgmestre de KARENGERA (Cyangugu), Mme MUKANDOLI Anne Marie, fut abattue de plusieurs balles chez elle par un élément en uniforme militaire. Une semaine plus tard, dans la nuit du 18 au 19 mai 1996, le Bureau communal de Karengera fut attaqué et complètement incendié par des “individus armés non identifiés” qui auraient libéré 71 des 123 détenus du cachot communal.
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Dimanche le 7 Juillet 1996 vers 18h30, le Bourgmestre de la commune RUSHASHI (Kigali-Rural), Vincent MUNYANDAMUTSA fut poignardé et tué à 300 mètres environ du Bureau communal et du Centre de négoce de Rushashi, où il venait de passer quelques moments de la soirée avant de rentrer chez lui à moto. Il fut tué à 3 km de son domicile. Ce jour-là, deux autres personnalités de Rushashi ont été tués dans deux embuscades séparées: il s’agit du Chef du Parquet de Rushashi, le Substitut du Procureur Floribert HABINSHUTI tués avec treize personnes dont sa femme, ses deux enfants et ses trois proches parents et du Directeur de l’École Secondaire de Rwankuba: Laurent BWANACYEYE. D’après les enquêtes de notre Centre et des autres enquêteurs des droits de l’homme au Rwanda, ces trois embuscades ont été tendues par des militaires de l’APR et la DMI.
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Dans la soirée du 11 Juillet 1996, le Bourgmestre de NYABIKENKE (Gitarama), Élie DUSABUMUREMYI est tombé dans une embuscade de retour d’une réunion de pacification à la S/préfecture de Kiyumba (Gitarama). Le Colonel Charles KAYONGA, qui était dans les environs avec son escorte, fut soupçonné pour ce meurtre.
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Dans la nuit du 27 au 28 Octobre 1996, le Bourgmestre de NYAKABUYE (Cyangugu), Madame Judith MUKABARANGA, a été abattu chez elle de plusieurs balles par des malfaiteurs “non identifiés”.
Toutes ces autorités locales, ainsi que d’autres personnes qui ont défendu la population, ont été tuées parce qu’ils gênaient les militaires dans leur répression aveugle et meurtrière contre la population hutu en général. Le Centre ignore s’il y a eu des enquêtes officielles sur ces assassinats. S’il y en a, ce qui est sûr c’est qu’aucune d’elle n’a abouti jusqu’à présent.
Conclusion : Pour des calculs politiciens, certains criminels du FPR sont promus au moment où d’autres sont assassinés. Ainsi, l’ancien préfet Protais MUSONI est promu au rang de ministre alors que les autres criminels du FPR ont été assassinés par les escadrons de la mort issus de la DMI :
– Le lieutenant colonel John BIRASA, ancien commandant du secteur militaire de Byumba où il a fait massacré des milliers de civils hutu (dont 1500 civils hutu tués au stade de Byumba le 28/04/1994 à partir de 14h), a été assassiné le 7 avril 1998 dans une embuscade attribuée à tort à des « infiltrés hutu » par les autorités rwandaises.
– Monsieur Assiel KABERA, ancien préfet de Kibuye, a été assassiné le 5 mars 2000 à son domicile à Kigali au moment où il était devenu Conseiller de l’ancien Président de la République Pasteur Bizimungu (condamné à 15 ans de prison en juillet 2004). Il s’était distingué impunément dans les massacres des milliers de civils hutus à Kibuye.
Recommandations : Le Centre de Lutte contre l’Impunité et l’Injustice recommande :
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le limogeage immédiat du ministre Protais MUSONI et des autres criminels issus du Front Patriotique Rwandais ;
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la fin de l’impunité pour ce criminel notoire protégé par le président Paul Kagame ;
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la poursuite en justice d’autres criminels du FPR déjà identifiés par les organisations des droits humains et le Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR) tels que les officiers supérieurs : Fred IBINGIRA, KAYUMBA Nyamwasa, Karake KARENZI, Charles KAYONGA, James KABAREBE, Jack NZIZA, Denis KARERA, John ZIGIRA, Dany MUNYUZA, Willson GUMISILIZA, Éric MUROKORE etc….
Pour le Centre, MATATA Joseph, Coordinateur.
Le Centre de Lutte contre l’Impunité et l’Injustice au Rwanda est une association de défense des droits humains basée en Belgique, créée le 18 août 1995. Ses membres sont des militants des droits humains de longue date. Certains ont été actifs au sein d’associations rwandaises de défense des droits humains et ont participé à l’enquête CLADHO/Kanyarwanda sur le génocide de 1994. Lorsqu’ils ont commencé à enquêter sur les crimes du régime rwandais actuel, ils ont subi des menaces et ont été contraints de s’exiler à l’étranger où ils poursuivent leur engagement en faveur des droits humains.