RWANDA: PLUSIEURS MILITAIRES EX-FAR ONT ETE TUES, PORTES DISPARUS, EMPRISONNES SANS ENQUETES et SANS DOSSIERS JUDICIAIRES et SOUVENT VICTIMES DE MACHINATIONS
Introduction
Depuis la victoire militaire du Front Patriotique Rwandais, les nouvelles autorités rwandaises, appuyés par quelques hauts officiers intègres des ex-F.A.R. (Forces Armées Rwandaises), ont lancé un appel aux membres des ex-FAR qui voulaient intégrer l’APR (Armée Patriotique Rwandaise, la nouvelle armée du FPR) de revenir au Rwanda pour reconstruire leur pays dévasté par la guerre et les massacres.
A cette époque, c’est le Major CYIZA Augustin (Ancien Président du Conseil de guerre) qui accueillit les premiers militaires FAR qui répondirent à cet appel. Ils furent acheminés dans les centres de formation comme le camp militaire de GAKO et au nouveau Centre de formation militaire de RUBONA (en préfecture Butare) pour une formation idéologique et apprendre une nouvelle façon de “défiler ou de marcher”. Au niveau des stratégies et techniques de guerre, ils n’ont pas appris beaucoup de choses
Deux cérémonies d’intégrations d’anciens militaires ex-FAR ont eu lieu en 199
Le 25 Janvier 1995 à GAKO (dans le Bugesera au sud-est du pays) il y eut une grande parade militaire et des cérémonies “très médiatisées” pour célébrer ce qu’on a appelé l’intégration des ex-FAR dans l’Armée Patriotique Rwandaise (APR). Des discours furent prononcés et tous rentrèrent plus ou moins “satisfaits mais préoccupés” de savoir si les discours seront traduits dans les faits et les comportements. Les Colonels NDIBWAMI et GATSINZI ont été “nommés” respectivement : Chef d’Etat-Major de la Gendarmerie et Chef d’Etat-Major Adjoint de l’APR. Quelques autres anciens officiers ex-FAR ont été “éparpillés” dans des bureaux et à des “postes” purement “honorifiques” où toutes responsabilités et prérogatives leur sont refusées
Le 9 Septembre 1995 à BUTARE (dans le sud-centre du pays): 1.300 militaires des ex-FAR dont cinq (5) officiers supérieurs, treize (13) officiers et un (1) spécialiste de la marine ont été “intégrés” dans l’APR. Selon le journal de l’APR “Ingabo n°4, de sept.1995, page 23”, les différentes personnalités qui ont pris la parole, ce jour-là ont félicité les militaires qui se sont désolidarisés des génocidaires. Le Colonel Balthazar NDENGEYINKA “a été nommé” chef militaire du Secteur militaire de Gitarama-Kibuye; le Lieutenant Colonel Laurent MUNYAKAZI “a été nommé” chef du Bataillon 35 de l’APR.
D’autres hauts officiers ont été “casés” dans des postes où ils se demandent “ce qui se passe et ce qu’ils doivent faire” dans cette armée! Une armée qui ne semble pas être “une armée nationale” mais une armée “au service des cliques extrémistes tutsi”. En effet “ces cliques” se définissent comme suit: une clique des “ougandais” (anciens exilés venus de l’Uganda), une clique des “Burundais” (venus de Bujumbura-Burundi) et une petite et trop faible clique de “rescapés tutsi” qui est souvent manipulée, utilisée et exploitée pour des intérêts socio-politiques et socio-économiques du “pouvoir occulte” des chefs militaires et politiques extrémistes. La clique des “laissés pour compte” composés d’exilés tutsi venus du zaïre “les banyamulenge” et la plus défavorisée s’est “taillée” une part de lion dans la Magistrature largement “purifiée de ses anciens éléments hutus”.
Chapitre I : Premières arrestations et emprisonnements arbitraires des militaires “intégrés” dans l’Armée Patriotique Rwandaise (APR)
Le 7 Février 1995 (soit 15 jours après les “fameuses cérémonies d’intégration”), plus de 110 militaires FAR furent enlevés du Camp militaire de GAKO (préfecture de Kigali-rural, au Bugesera dans le Sud-Est du Rwanda) et conduits vers une destination inconnue jusqu’au 19 février 1995. Il s’agissait de plus ou moins 30 officiers et sous-officiers et de 80 soldats des ex-FAR dont les épouses n’arrivaient plus à retrouver leurs traces, malgré leurs interventions auprès des autorités militaires et civiles
Le 19 Février 1995, les épouses des militaires FAR disparus ont décidé d’alerter les Associations locales des droits de l’homme. Après plusieurs recherches, les militaires disparus furent localisés dans la prison de RILIMA (située à +/- 15 km du camp Gako) vers le 24 février 1995, suite à une descente d’une mission d’enquête du CLADHO (Collectif des Ligues et Associations des Droits de l’Homme au Rwanda) dans le Bugesera. Lorsque la Délégation du CLADHO se présenta le 24 février 1995 au Camp militaire de Gako et à la Prison de Rilima, les responsables militaires et pénitentiaires ont évité tout contact avec la dite délégation en prétendant qu’ils sont “en déplacement”. La délégation n’a pas pu non plus rencontrer leurs adjoints “qui ont prétendu être absents” à leur tour. Cette fuite de responsabilité s’expliqua par après, lorsqu’il devint clair que plusieurs de ces militaires étaient détenus sans “enquêtes et dossiers judiciaires” jusqu’aujourd’hui.
Les emprisonnements des militaires ex-FAR “intégrés” se sont généralisés
En Novembre 1995 (soit 10 mois après la 1ère intégration et 2 mois après seulement la 2ème “intégration”, ils étaient plus de 600 militaires ex-FAR détenus au Bugesera dans le camp militaire de Gako et à la Prison de Rilima où ils attendaient un hypothétique procès, d’autant plus qu’ils n’avaient subi aucune interrogatoire. Ils avaient été arrêtés sans enquêtes et restaient “détenus” sans aucun dossier judicaire depuis neuf mois!
La plupart de ces 600 ex-FAR emprisonnés sont des “jeunes officiers” qui ont terminé les études universitaires ou l’Ecole supérieure militaire. Certains ont même été formés dans les grands Ecoles militaires en Occident. Le Centre dispose de quelques noms dont 23 officiers
Le 13 Janvier 1997 (soit deux ans après la 1ère “réintégration”), le Centre a reçu une information fiable faisant état des mauvaises conditions de détention de près de 1000 militaires des ex-FAR “réintégrés” dans la Prison Militaire de KIBUNGO (à l’Est du Rwanda). Cette prison serait occupée également par environ 3000 (trois mille) soldats de l’Armée Patriotique Rwandaise arrêtés pour plusieurs délits. Tous ces militaires ont été emprisonnés d’abord à la prison de RILIMA, puis transférés à la Prison de KIBUNGO.
Les prisonniers militaires de l’APR reçoivent leurs salaires et peuvent se rendre au marché chaque mercredi. Ils peuvent s’acheter de la bière et il y en a qui fument du chanvre.
Des informations dignes de foi font état des mauvais traitements inhumains et dégradants que ces prisonniers militaires de l’APR font subir à leurs collègues des ex-FAR qui ne bénéficient pas des mêmes avantages qu’eux
L’inquiétude du Centre sur leur situation est fondé sur les informations qui font état des mesures interdisant au Comité International de la Croix Rouge de visiter ces prisonniers
Le Centre de Lutte contre l’Impunité et l’Injustice au Rwanda continue ses investigations et s’efforcera de réactualiser régulièrement le dossier des ex-FAR
Retenons, pour mémoire, les noms de quelques officiers des ex-FAR qui se trouvent en prison sans “dossier judiciaire” et sans enquêtes depuis novembre 1995:
– Major NDAMAGE Martin – S/Lt KALIMBANYA Tassien
– Major UWAMUNGU Athanase – S/Lt HAMENYIMANA Laurent Iryivuze
– Capitaine BWANAKWELI Isidore – S/Lt NDEKEZI Vincent
– Capitaine TWAGIRAMUNGU Théophile – S/Lt RUTAGUMYA Innocent
– Capitaine HAKUZWEYEZU Joseph – S/Lt UGUZENEZA Boaz Rwamirambi
– Capitaine KAYIHURA Pascal – S/Lt UTEGEREJIMANA Thadée
– Capitaine MUGABO Jean de Dieu – S/Lt HABIMANA Aaron
– Lieutenant MUGABO François – S/Lt NGENZI Félicien
– Lieutenant MUTABARUKA Jean-Paul – S/Lt MUDAHERANWA Innocent
– S/Lt NSENGUMUREMYI Innocent – S/Lt MUNYENGABE Wellars
– S/Lt LIBERAKURORA Boniface – S/Lt MUNYAKAZI Augustin
– S/Lt MUSABYIMANA Tharcisse
Plusieurs sous-officiers des ex-FAR ont été emprisonnés progressivement et représentent aujourd’hui une proportion importante de ces 1000 militaires emprisonnés dans la prison militaire de KIBUNGO dans des conditions inhumaines et sous la torture physique et morale, leur infligée par les collègues militaires de l’Armée Patriotique Rwandaise (APR).
Même les militaires ex-FAR “intégrés”, qui ne sont pas en prison, sont continuellement persécutés et humiliés publiquement. par même des soldats incultes de l’APR. Ils ne portent pas d’armes sur eux comme le font “les soldats du FPR”.
Ceux qui prétendent occuper des “postes de responsabilités” dans l’APR, sont en effet des “figurants” qui n’ont aucun pouvoir de décision et “qui ne sont pas généralement informés” sur les activités des troupes “qu’ils sont censés commander”.
Chapitre II : Assassinats maquillés, disparitions, problèmes de mutations ou affectations au sein des différentes unités de l’APR
– Ce problème ne se pose pas seulement pour les ex-FAR, mais le secret qui entoure « les mutations” au sein de l’APR a permis aux “responsables de la purification ethnique de l’APR” à faire disparaître un nombre impressionnant d’officiers, sous-officiers et soldats hutu enrôlés déjà depuis l’Uganda dans l’Armée du FPR. Tout au long de son avancée, l’armée du FPR a recruté dans ses rangs beaucoup de jeunes hutu qui ont été progressivement assassinés, portés disparus ou emprisonnés en toute discrétion. C’est ainsi que les jeunes recrues hutu de 1994 originaires des préfectures BYUMBA, KIBUNGO, KIGALI-Rural, GITARAMA et BUTARE sont pour la plupart introuvables aujourd’hui. Après la victoire du FPR, les militaires extrémistes tutsi se sont débarrassés de plusieurs collègues hutu en “toute impunité”.
– Ces disparitions et déportations, souvent organisées en accidents de la route, explosions de mines, maladies, mutations secrètes, etc… “sont restées impunies” jusqu’aujourd’hui.
– Cette impunité et l’absence des enquêtes supposent qu’elles auraient été commanditées par la plus “haute hiérarchie” militaire de l’APR ou le “noyau dur” qui jouit du “pouvoir occulte” qui contrôle et paralyse “les institutions officielles de façades” mises en place par les extrémistes tutsi qui ont remplacé les extrémistes hutu au “pouvoir réel”
Assassinats des militaires ex-FAR après leur rapatriement forcé du Zaïre et de Tanzanie:
1) Dans la nuit du 18 au 19 janvier 1997 en commune NYARUTOVU (Ruhengeri), seize (16) personnes ont été assassinées dont le Major BIZABARIMANA Laurent. Un ancien officier des ex-FAR rapatrié du Zaïre en novembre 1996. Il a été assassiné avec sa femme, ses enfants et ses voisins. La famille du Major, ses parents, ses connaissances et ses voisins avaient organisé une petite fête à l’occasion de la libération provisoire du Major qui venait de passer quelques jours en prison. C’est à ce moment là que des “malfaiteurs” les ont massacrés. Le Major BIZABARIMANA Laurent avait fréquenté la même école militaire que le Général KAGAME aux USA “Command and General Staff College”.
2) En date du 20 janvier 1997, MBATUYIMANA Jean de Dieu, Caporal des ex-FAR et une autre personne dont nous n’avons pas pu connaître le nom, ont été tués par balles au camp militaire de MUHOZA (Ruhengeri), sous prétexte qu’ils auraient tenté de s’évader. Ils auraient êté arrêtés à la suite de l’assassinat de (trois) 3 coopérants espagnols de Médecins du Monde (MDM) dont MBATUYIMANA Jean de Dieu était gardien de nuit. Des enquêteurs indépendants nous ont confirmé que Jean de Dieu a été abattu de sang froid par les gendarmes de la Brigade de Ruhengeri, parce qu’il pouvait avoir reconnu des soldats de l’APR parmi les “malfaiteurs du commando” qui a assassiné les espagnols et blessé un américain. L’américain a crié, paraît-il, “je suis américain” pour ne pas être achevé. Jean de Dieu MBATUYIMANA s’était présenté à la Brigade de gendarmerie pour témoigner, car il avait été forcé de transporter les biens pillés par les membres du commando en question.
3) Le 21 janvier 1997 vers 20h30, le Colonel HAKIZIMANA Stanislas a été assassiné près du Centre de négoce de Gatega à MURAMBA dans le secteur RUCANO, commune Satinsyi, préfecture Gisenyi. Il a été tué au domicile de sa belle famille qui l’avait logé avec sa femme Eugénie Mukandinda et ses deux enfants: Eric Ukoyivuze (né en 1978) et Gilbert Nshimiyimana (né en 1980). Toutes les personnes présentes au nombre de dix (10) qui vivaient dans cette habitation ont été toutes tuées sur le champ. Douze (12) voisins qui ont été témoins de ce massacre et qui auraient pu identifier ces assassins ont été eux aussi tués à cette occasion. Seules deux filles du Colonel: l’aînée Espérance Mujawamungu (née en 1976) et sa fille cadette Josiane (née en 1982) ont survécu parce qu’elles étaient absentes. Des personnes non identifiées en tenue militaire sont responsables de ce crime , mais la population locale affirme qu’il s’agissait des militaires de l’APR. Ce Colonel des ex-FAR, rapatrié du Zaïre en novembre 1996, a fréquenté la même école militaire que le Général KAGAME au “Command and General Staff College” au USA lorsqu’il était encore “officier ougandais”. Le Général Kagame est aujourd’hui Vice Président et Ministre de la Défense Nationale de la République Rwandaise depuis 1994.
– Il s’était rapatrié avec sa famille en Novembre 1996. Comme il avait reçu l’ordre de se présenter régulièrement au Camp militaire de Mukamira (Gisenyi) deux fois par semaine, il avait jugé bon de loger chez ses beaux parents au bord de la grand route Gitarama-Mukamira pour honorer ces rendez-vous forcés. Les paysans de cette région ont été choqués par cet assassinat aveugle qui a frappé plusieurs innocents, alors que seul le Colonel était visé. Environ plus de 500 personnes auraient été tuées par l’APR
4) Le 23 janvier 1997, Radio-Rwanda a annoncé la mort dans la prison de GISENYI de deux officiers des Ex-FAR arrêtés après leur rapatriement forcé en novembre 1996. Il s’agit de: – Lieutenant Colonel NZABANITA Augustin (surnommé “Dictionnaire”) et
– S/Lt NSABIMANA, qui avait été renvoyé de l’armée en 1992.
Il paraît qu’ils se seraient suicidés par pendaison dans leur cellule à l’aide de leurs habits
Les témoins qui connaissent bien le Lt Colonel NZABANITA Augustin affirment que c’était un homme sans aucune personnalité, assez lâche et incapable de “se suicider”. Des témoignages fiables accusent les tortionnaires de la Directorate Military Intelligence (DMI) qui les auraient “suicidé” après les avoir torturés, croyant leur soutirer des “secrets militaires ou après les avoir forcés à signer des déclarations dictées par le DMI”. Il est connu aussi que les détenus sont souvent dépouillés de leurs habits, de façon qu’il serait presque impossible de “se pendre à l’aide de sa culotte”. Le Lt Colonel Nzabanita Augustin avait été écarté des FAR en exil. En effet, il fut battu à Goma en aoû 94 par les soldats qui lui reprochaient d’avoir livré au FPR la ville de Gitarama, tombée le 12 juin 1994 en son absence alors qu’il avait emporté les clés du stock de munitions. Réfugié d’abord à Naïrobi (Kenya), il fut incapable de se prendre en charge. Il prit le chemin vers la Tanzanie où il se résigna à aller vivre avec les paysans dans les camps de réfugiés, jusqu’au rapatriement forcé du 7/12/1996.
5) Radio-Rwanda a annoncé, également le 23 janvier 1997, la mort du Major UWIMANA François-Xavier, ses six (6) enfants et son voisin. En tout huit personnes furent tuées. Le Major UWIMANA et sa femme se sont également rapatriés en novembre 1996. Il habitait en commune NYAMYUMBA (préfecture Gisenyi). Les circonstances de cet incident n’ont pas été annoncées par Radio-Rwanda.
6) Le 29 janvier 1997, le corps du Major Lambert RUGAMBAGE, un officier ex-FAR qui était détenu à la prison militaire de Kibungo, fut retrouvé dans la morgue de l’Hôpital militaire de Kanombe (Kigali). Il portait des traces de traumatismes à différents endroits ainsi que de la boue sur les vêtements et dans les cheveux. Ces indices trouvés sur le cadavre suggéraient que la victime serait morte à la suite des coups reçus.
Selon des témoignages fiables, en date du 22/01/1997, des militaires de l’APR l’avaient sorti de la prison sous prétexte d’aller lui offrir à boire. Il n’est plus revenu dedans.
7) Après la mort du Major RUGAMBAGE, des officiers des ex-FAR auraient été transférés de la prison militaire de Kibungo vers la localité de MULINDI, autre lieu de détention situé tout près du bureau communal de KANOMBE proche de la Capitale Kigali en préfecture de Kigali-rural. Peu avant l’assassinat du Major Rugambage, les ex-FAR prisonniers ne pouvaient plus recevoir la visite des membres de leurs familles depuis déjà le 16/01/1997. Le Centre est très préoccupé par cette mesure qui cacherait un “plan d’élimination physique” de ces militaires hutu considérés comme “indésirables” par le pouvoir occulte des extrémistes. La séparation des officiers avec les simples soldats ne cache-t-elle pas une technique criminelle de “séparer et déplacer les détenus familiers et solidaires” pour les éliminer par petits groupes selon “les vieux techniques” des brigades de tueurs de l’APR?
8) Le 13 mai 1997, le Major BAHEMBERA Pierre Célestin a été tué parmi les prisonniers détenus dans le cachot communal de la commune CYABINGO. Depuis l’affectation du Colonel KAYUMBA Nyamwasa au poste de Commandant des opérations militaires dans le nord-ouest du Rwanda au début du mois de mai 1997, les attaques contre les bureaux et cachots communaux ainsi que les massacres de civils non armés se sont intensifiés. Le Major Pierre Célestin BAHEMBERA a disparu dans ce tourbillon d’une « guerre civile » annoncée par les extrémistes tutsi après le rapatriement forcé des réfugiés hutu de l’ex-Zaïre et de la Tanzanie. Voici le bilan des massacres commis à cette époque dans cette région :
– Le 9 mai 1997 : Un convoi militaire a été attaqué dans le Secteur GITWA en commune NKULI (Ruhengeri). Suite à cette attaque, l’APR a organisé des opérations de représailles dans plus ou moins sept secteurs de la Commune NKULI. C’est ainsi que du 9 au 12 mai, les militaires ont massacré plus de 1.400 personnes réparties comme suit:
404 tués dans le seul secteur RYINYO, 325 tués dans deux cellules Kintobo et Gatovu du secteur GITWA, 253 tués dans le secteur MUKAMIRA, 148 tués dans le Secteur GATOVU et 98 tués dans le secteur RUKOMA.
– Le 11 mai 1997: L’APR a massacré 35 personnes (dont un inspecteur scolaire, des enseignants et des commerçants qui assistaient à une réunion dans le secteur Rutare, Cyabingo) – Le 16 mai 1997: Plus d’une centaine d’individus qualifiés « d’infiltrés » auraient attaqués un détachement militaire au Bureau communal de CYABINGO. Une bataille de cinq heures les auraient opposé à l’APR. Sous prétexte de rechercher ces « infiltrés », l’APR a organisé des opérations de « représailles » et massacré 175 personnes dans le secteur MUHORORO. Au cours d’une réunion tenue par les responsables administratifs et militaires, qui voulaient justifier ces massacres aveugles, ceux-ci reprochèrent aux habitants de soutenir les infiltrés.
– Du 27 au 30 mai 1997: Neuf (9) personnes ont été tuées dans la cellule RWANKELI du Secteur GITWA lors d’une vérification des cartes d’identité. Les militaires de l’APR ont ordonné aux victimes de courir avant de les abattre comme des lapins. Lors des funérailles de 7 victimes d’entre eux, les responsables militaires les ont présentés comme des infiltrés alors que l’une des victimes était un habitant du Secteur GATOVU.
– Le 4 juin 1997: Un groupe de plusieurs centaines « qualifiés d’infiltrés » auraient attaqué la Cellule RWANKERI (commune Nkuli) et auraient tué six (6) soldats de l’APR. Ils auraient ensuite tué le Directeur de l’Ecole Secondaire de Rwankeri, sa femme, ses trois enfants et un visiteur (ancien exilé tutsi).
– Le 6 juin 1997: Une bataille rangée entre l’APR et les « infiltrés » aurait duré deux jours.
– Le 8 juin 1997: En réponse à ces attaques l’APR a organisé des « opérations de ratissage et de représailles » dans plusieurs secteurs de NKULI et a massacré vingt trois (23) habitants de RWANKERI (dont deux hommes, une famille de 11 personnes, une famille de 6 personnes dont une femme et ses trois enfants).
– Le 9 juin 1997: plusieurs milliers de personnes ont été rassemblés au Stade de Ruhengeri à partir des jeunes de 15 ans. Les femmes ont été relâchés vers 17h30 et les hommes vers 19h. Profitant de l’absence des habitants, les soldats de l’APR ont fouillé systématiquement les maisons d’habitation. Dix (10) hommes ont été tués dans les secteurs CYUVE, GASANZE et MUBONA (commune Kigombe) alors qu’ils rentraient de cette réunion.
– Le 10 juin 1997: plus de 200 personnes auraient attaqué le bureau communal de la commune GATONDE, libéré tous les prisonniers et tué un soldat de l’APR. Ce même jour un autre groupe aurait attaqué le bureau communal de NYAMUTERA. Sous prétexte de rechercher les auteurs de ces attaques, l’APR a mené des opérations « de représailles dans les deux communes concernées », puis en commune KINIGI et dans les secteurs voisins de la commune NDUSU. C’est au cours de ces opérations que: 294 habitants furent massacrés dans les quatres communes (GATONDE: 143 tués dont le conseiller du secteur Munanira, KINIGI: 80 tués, Nyamutera: 40 tués, NDUSU: 31 tués)
– Le 16 juin: le corps d’un employé du Programme Alimentaire Mondial (PAM) qui avait été arrêté par les militaires de l’APR, a été retrouvé en état de décomposition dans le Secteur MUHOZA en commune Kigombe (Ruhengeri). On peut citer des centaines d’autres cas.
– Le 2 juillet 1997, le Major MFIKIJE Anne Marie (épouse du Major Bahembera P.Célestin) a été retrouvée et tuée par l’APR avec deux de ses cinq enfants. Leurs cadavres ont été jetés dans les latrines (WC) de la commune Nyamutera en préfecture Ruhengeri.
9) D’autres officiers des ex-FAR rapatriés en 1996-1997 auraient été assassinés aussi. Le Centre ne dispose pas des précisions et continue d’enquêter sur ces cas. Il s’agit entre autres de:
– Lt Colonel SEBAHIRE Antoine, ancien élève de l’IRSD (Institut Royal Supérieur de Défense) avec le brevet BEM (Breveté d’Etat Major) originaire de Kibungo, tué dès son retour de Tanzanie chez lui à Kibungo avec sa famille.
– Lt Colonel BIVUGABAGABO Marcel, originaire de Ramba-Gisenyi, tué avec sa femme et ses enfants. Celui-ci a fait la même session que le Général KAGAME n’a pas pu terminé en 1990 à la “Command General Staff College” aux USA.
– Capitaine MUGARURA Alexandre, rapatrié en novembre 1996 et porté disparu– Capitaine HAKIZIMANA Théodore, originaire de Butaro-Ruhengeri, tué dès son retour au Rwanda.
Chapitre III : Machinations contre les militaires ex-FAR rapatriés
récemment ou qui étaient restés au pays:
Le rôle du Special Service (ou Special Branch):
Pour donner une idée sur “l’ampleur des machinations” dirigées contre les ex-FAR rapatriés ou ceux qui n’ont jamais quitté le pays, le Centre a choisi deux cas récents pour illustrer l’ingéniosité du “Special Service” (une des différentes branches spéciales du D.M.I: le Directorate Military Intelligence = service des renseignements militaires) chargé :
– de fomenter des campagnes d’intoxication et de désinformation relayées par Radio-Rwanda et les “nouveaux média de la haine”.
– de travailler et préparer l’opinion publique en vue de justifier la répression militaire, les arrestations et détentions arbitraires (par exemple le Special Service a inventé: la formule “des infiltrés hutu”, les “empoisonneurs hutu”, les groupes religieux “subversifs”, la diffusion des “tracts” et autres “montages” de communiqués soi-disants émanant des organisations fictives extrémistes hutu, l’éternel “péril hutu” qui menacerait la minorité tutsie l’imminente extermination des “rescapés tutsi” par des infiltrés hutu, etc…
– de créer, d’exploiter et de protéger les “syndicats” de délateurs, des “escadrons” de la mort et des “milices” tutsi: outils très efficaces de “délation et de chantage d’Etat”
– du Bureau d’études du “crime organisé”: assassinats politiques, attentats, suicides maquillés, exécutions sommaires et extra-légales de détenus sous “prétexte d’évasion ou de suffocation”, etc…
– d’organiser le “banditisme organisé”, le racket contre des opérateurs économiques hutus, le squattage des “biens d’autrui”, l’élimination physique ou l’emprisonnement des propriétaires légitimes des biens, etc…
– de “pousser à l’exil” des cadres, des fonctionnaires de l’Etat, des opposants politiques et des opérateurs économiques hutu, etc…
– d’organiser des campagnes de “chantage” contre la Communauté Internationale en général ou certains pays, la Société Civile en général (telles que les Congrégations religieuses, les journalistes, les coopératives, les organisations humanitaires et des droits de l’homme), des personnalités tant “étrangères que nationales”, des paysans progressistes etc…
1)Machination contre le Lt MUGEMANSHURO Alfred des ex-FAR:
Le Lieutenant Mugemanshuro Alfred était Docteur en médecine et s’était rapatrié avec sa famille fin 1996 lors du démantèlement militaire des camps de réfugiés du Zaïre. Il avait d’abord logé chez sa belle-mère dans la cellule Kagunga (au pied du mont Rebero) dans le secteur Gikondo. Le jour de la machination d’un “attentat à la mine dans la gare routière de Kigali” il avait déjà déménagé avec sa femme et ses enfants et résidait dans la cellule Gashyekero du secteur Gikondo, commune Kicukiro, Préfecture de la Ville de Kigali (PVK).
Lorsqu’il logeait encore chez sa belle-mère, un soldat de l’APR en tenue militaire et âgé de +/- 35 ans était venu le voir accompagné de Mr Rwanyindo.A. (ancien responsable de la cellule Kagunga nommé après juillet 94). Ce soldat prétendait s’appeler “RUTEMBESA” et être un ami du Lt Alfred à qui il venait rendre visite. Ils ne l’ont pas trouvé là-bas car la famille avait déménagé. Quand ils se sont présentés au nouveau domicile du Lt Alfred, il n’y avait personne. Quand ils se présentèrent la deuxième fois, il ne trouvèrent pas les intéressés à la maison. Ce n’est que par après que le Lt Alfred et sa femme les ont rencontrés à l’endroit appelé “Konteneri” juste à l’arrêt-terminus des taxis qui desservent la direction Ville-Nyenyeri. Le soldat Rutembesa leur expliqua comment il les avait cherché et manqué.
Par après, ils se sont revus plusieurs fois de façon que l’entourage a cru “comprendre qu’ils étaient amis”. Quant à leur “amitié”, le Lt Alfred a toujours affirmé à sa femme et à sa belle-mère qu’il n’avait jamais connu ce soldat Rutembesa qui continuait à se présenter comme son ami. Quand “l’identification de la victime” fut terminé, le “Spécial Service” passa au montage de la “machination proprement dite”.
La machination suivi de l’arrestation et de la disparition du Lt Mugemanshuro Alfred:
En date du 8 Janvier 1997, le Lt Mugemanshuro Alfred avait été engagé au Centre de Santé de Gikondo géré par les Soeurs Pallotines originaires de Pologne. La femme d’Alfred travaillait à ce même Centre de santé d’ailleurs.
Curieusement et subitement, le Lt Mugemanshuro et sa femme ont été suspendu de leur travail le 7 février 1997 sur ordre des autorités de la Région Sanitaire de Kigali qui ont exigé que le Lt MUGEMANSHURO Alfred présente d’abord son dossier de “demande d’emploi” au Ministère du Travail au plutard le 10 février 1997. C’est justement le jour où il devait apporter son dossier au Ministère qu’il fut arrêté dans la gare routière de Kigali sous prétexte qu’il “venait de pose une grenade” sous un taxi dans la gare. Il était parti de Gikondo chez lui et aurait été arrêté dans la gare après sa sortie du taxi.
Quand sa belle-mère qui travaille en ville est arrivé vers 11h dans la gare routière de Kigali, elle a appris que son “gendre” vient d’être arrêté pour avoir “posé une grenade” dans la gare. Ce fut justement l’ex-responsable de cellule Kagunga, RWANYINDO (celui qui avait conduit le soldat RUTEMBESA chez le Lt Alfred) qui lui apprit la “mauvaise nouvelle”. La vieille femme, abasourdie, ne croyait pas que son gendre pouvait poser un acte criminel. Mr Rwanyindo, qui travaillait présentement dans la gare, lui a rétorqué comme suit: “Tu me réponds exactement comme Mr RUTEMBESA quand je lui ai appris que le Lt Afred venait de poser une mine”. Cette échange de paroles confirme la présence des “agents” Rutembesa et Rwanyindo à l’intérieur de la gare au moment où le Lt Alfred se faisait arrêter.
Si des enquêtes sérieuses pouvaient se faire au Rwanda, il importerait de savoir avec exactitude si le Lt Alfred a été pris en flagrant délit et quelle serait “l’identité du militaire” de l’APR qui “aurait désamorcé” la grenade en question.
Une propagande bien “coordonnée” et la publicité qui a entouré cette machination:
C’est justement en date du 7 février 1997 que presque “simultanément” Radio-Rwanda a annoncé que “Mr Mugemanshuro Alfred, ancien Lieutenant des ex-FAR, a posé une grenade en dessous d’un pneu d’un taxi qui dessert la ligne “Sgeem Nyenyeri-Ville”. Par chance, un des “enfants de la rue” a averti un militaire “qui l’a désamorcé”.
En examinant les circonstances et le mystère qui a entouré cette “pose de grenade” avant et après, des anomalies suivantes ont été relevé de prime abord:
– Radio-Rwanda a annoncé que “l’enfant de la rue” qui a vu le Lt Afred “poser la grenade” est originaire de la même commune Ntyazo (Butare) que le Lt Mugemanshuro Alfred.
– Or, la réalité c’est que le Lt Alfred est originaire de la commune KIGEMBE, située très loin de l’autre côté de la préfecture BUTARE.
Après son arrestation, le Lt Docteur MUGEMANSHURO Alfred fut porté disparu et les membres de sa famille furent maltraités et persécutés par le responsable de cellule.
Depuis son arrestation du 7 février jusqu’au 20 février 1997, sa famille n’avait pas pu lui apporter de la nourriture et avait perdu complétement ses traces.
Le jour de l’arrestation du Lt Alfred, en rentrant chez eux, son épouse a trouvé leur chambre fermée à clé par le Responsable de la cellule Gashyekero. Elle a attendu jusqu’à 1h du matin le retour de ce responsable qu’un messager était allé cherché afin qu’il procède à la fouille et puisse leur ouvrir. Le Responsable de la cellule “a promené” le messager en question toute la nuit dans les quartiers de Gatenga, Karambo, Kicukiro en le présentant comme ceci: “voici le petit frère du malfaiteur qui a posé la grenade dans la gare”. Et dans chaque quartier le messager fut tellement battu qu’il rentra dans un “très mauvais état”. Dès qu’ils arrivèrent, la fouille n’a révélé “ni fusil ni grenade” chez Alfred Mugemanshuro, mais cela n’a pas empêché que sa femme soit rouée de “coups”. Ensuite, l’épouse de Alfred et le petit frère de ce dernier ont été conduits au Bureau communal de Kicukiro qui refusa de les recevoir. Par après, ils furent conduits à la Brigade de gendarmerie de Gikondo. Tout au long du trajet, ils ont été frappés à l’aide des “ceintures”. Chaque fois qu’ils étaient éclairés par les phares d’une voiture, les coups cessaient pour reprendre après le passage du véhicule. Une fois arrivés à la Brigade de Gikondo, ils n’ont plus été battu. Ils y ont été retenu pendant 3 jours avant d’être relâchés.
2) Machination contre Mr SIBOMANA Stanislas, ancien réserviste des ex-FAR retraité:
Mr SIBOMANA Stanislas est un retraité des Forces Armées Rwandaises, retraité bien avant le déclenchement de la guerre du Front Patriotique Rwandais. Il s’était recyclé dans l’hôtellerie et la restauration et s’était fait une petite fortune bien avant le drame rwandais. Il est originaire de Gitarama et aurait clôturé son contrat dans les FAR suite aux persécutions qui étaient dirigées contre les militaires “originaires du sud du pays, le Nduga”.
Son complexe hôtel-restaurant-bar, très prospère pendant la période du multipartisme, ainsi que son domicile ont été complétement “détruites et rasés” par les Interahamwe pendant le génocide rwandais.Il était marié à une femme tutsi et avait eu toute les peines du monde pour le protéger des massacres. Au début des massacres il avait quitté la capitale Kigali pour se réfugier dans sa région natale de Gitarama où il bénéficia de la protection des paysans locaux. Autrement, il aurait été tué avec toute sa famille par les miliciens hutu qui l’ont pillé avant de détruire ses biens.
Rénommé et fiché comme un “opposant redoutable” par les extrémistes hutu sous le Régime du Président Habyalimana Juvénal, il avait échappé à plusieurs attentats. Fin 1993, son bar le “BAOBAB” a subi un attentat à la grenade qui a tué un client, blessé d’autres et détruit un bungalow où les consommateurs étaient assis.
Fin Mars 1997, il a fait l’objet d’une “machination diabolique” grâce à l’ingéniosité du “Special Service” qui a réussi à lui faire porter un délit grave: “le recel de fusils”. Voici comment le “montage s’est effectué”:
a) Un agent en civil s’est présenté chez Mr SIBOMANA Stanislas avec un sac contenant un fusil et l’a laissé chez lui.
b) Quelques minutes après, les forces de sécurité “en uniforme cette fois-ci” se sont présentés pour effectuer des “fouilles”.
c) C’est justement pendant ces “fouilles” qu’elles ont feint “découvrir” le sac que l’autre “agent en civil” avait laissé chez Sibomana et qui contenait un fusil.
d) Mr SIBOMANA Stanislas a été arrêté comme “un complice des infiltrés hutus” accusés de mener des attaques partout dans le pays, et d’être responsables “des meurtres et autres assassinats politiques ou crapuleux” commis actuellement au Rwanda.
Selon les responsables militaires et politiques, ces crimes commis généralement par “les escadrons de la mort et les milices issus des extrémistes tutsi” sont toujours imputables aux “infiltrés hutus”. Cette “formule” permet à l’Armée Patriotique Rwandaise (APR) a procéder aux massacres “en règle” et sous forme de légalité contre les populations hutu, sous prétexte de faire la chasse aux “infiltrés hutu”. Les infiltrés hutu sont définis comme étant: “les militaires ex-FAR et les miliciens hutu Interahamwe”
Chapitre IV : Quelques cas de disparitions des anciens militaires ex-FAR:
a) Disparition de l’ex-Adjudant Léodomir NGIRINSHUTI:
Léodomir NGILINSHUTI ex-Adjudant des FAR fut arrêté et porté disparu dans la soirée du 29/11/1995. Il habitait dans le secteur RWAMPARA, commune Nyarugenge dans la Préfecture de la Ville de Kigali. Il avait pris sa retraite pour cause de maladie depuis les années 1980.
Comme l’a rapporté sa femme Immaculée NYIRAHABIYAMBERE, le 28/11/1995 Léodomir a reçu une convocation signée par un Officier de la Police Judiciaire (OPJ) du Service de la “Criminologie” du nom de KARAKE Assoumani qui l’invitait à se présenter à son bureau le 29/11/1995. Léodomir, qui était diabétique et qui craignait que l’objet de la convocation ne l’oblige à rester longtemps à la Criminologie, a d’abord voulu s’acheter ses médicaments (insuline) afin de pouvoir se présenter en ayant sa provision. Les médicaments ayant été trouvés assez tard, il a décidé de se rendre au Service de la Criminologie le lendemain matin le 30/11/1995.
C’est entre 18h et 19h environ de ce 29/11/1995 que deux jeunes gens habillés en civil sont arrivés et ont demandé à Léodomir de les suivre. Sa femme aurait cherché à les suivre mais ceux-ci l’aurait rabrouée. Elle a informé le responsable de cellule Nyumbakumi, qui lui a dit qu’il fallait attendre le lendemain matin parce qu’il se faisait tard.
Le lendemain matin 30/11/1995, elle s’est rendue au Service de la Criminologie où on lui apprit que son mari Léodomir était détenu à la Brigade de Muhima. Pourtant elle ne l’y a pas trouvé. Elle est retournée à la Criminologie où elle a demandé à voir l’OPJ KARAKE Assoumani qui avait convoqué son mari. Lorsqu’elle a pu entrer en contact avec celui-ci, elle fut malmenée et traitée de tous les noms. Elle est rentrée sans savoir ce que son mari était devenu. Jusqu’aujourd’hui, on n’a pas encore retrouvé les traces de l’ex-Adjudant Léodomir NGIRINSHUTI.
b) Disparition du Lieutenant NSENGIMANA François, disparu le 12/08/1994:
Le Lt NSENGIYUMVA François est le fils de Nsengimana Aloys né le 18/2/67 à Mpanda, secteur Gitega, commune MUKINGI (Gitarama) et sa carte d’identité portait le n°30213.
– De retour de la zone turquoise (Kibuye), il a été arrêté à la barrière de RAMBURA entre la commune Mabanza et Kivumu (en préfecture Kibuye) le 12 août 1994 à 9h00 du matin, par quatre soldats de l’APR. Il était en compagnie d’un vieux Ntawurubara originaire de Bulinga
Il fut le seul qui dut donner ses pièces d’identité. On lui enleva sa chemise et ses souliers, avant de le frapper pour le contraindre d’accepter que c’est un militaire ex-FAR. Il a refusé d’avouer. Quand les soldats découvrirent dans son pantalon une grosse d’argent, ils ont chassé son compagnon Ntawurubara qui s’est éloigné un peu pour attendre le sort du Lt. Depuis 9h jusqu’à 16h ils ne l’avaient pas relâché, et il se décida à dormir dans un petit bois jusqu’au 13/8/94 afin de connaître le sort du Lt Nsengiyumva. Le 14/8/94, sa belle mère alertée est venue à cette barrière de Rambura pour s’enquérir du sort de son “gendre”. Les quatre soldats ont reconnu avoir arrêté le Lt mais qu’ils l’auraient relâché par après! Ils ont conseillé à la vieille maman d’aller attendre tranquillement le “retour de son gendre”. Jusqu’à cette date, toutes les recherches entreprises pour retrouver le disparu ont été vaines. Un de ces 4 soldats s’appelait BIZIMANA et fut muté à Butare en sept. 94 au lieu d’être puni!!
c) Disparition du Capitaine KABERA Jean, rapatrié du Zaïre le 25 août 1995:
– Le Capitaine KABERA, originaire de la commune NKULI (Ruhengeri), fut porté disparu lors de son transfert du Centre de transit de Nkamira vers la capitale Kigali. Il figurait parmi les 15.000 réfugiés rwandais, refoulés en Août 1995 par les Forces Armées Zaïroises avec la complicité du Haut Commissariat aux Réfugiés.
Que sont devenus les 96 anciens militaires refoulés du Zaïre en Août 1995?
Lors du rapatriement forcé d’août 1995, les réfugiés refoulés du Zaïre ont été enregistrés comme suit:
– 20/8/95 : 181 rapatriés
– 21/8/95 : 1.173 rapatriés
– 22/8/95 : 2.700 rapatriés
– 23/8/95 : 1.738 rapatriés
– 25/8/95 : 230 rapatriés
Les 230 rapatriés du 25 août 1995 venaient des camps de KATALE et KIBUMBA. Ces derniers “auraient décidé de rentrer librement” dans leur pays d’après les déclarations du Capitaine KABERA Jean (aujourd’hui porté disparu). Il y avait aussi 96 militaires et 5 officiers parmi les réfugiés. Ces derniers avaient été regroupés avec certaines personnes qui avaient été emprisonnées au Zaïre et qui étaient détenus à l’ETAG (Ecole Technique de Gisenyi) à Gisenyi à ce moment là: Voici les noms de certains militaires ex-FAR qui se sont faits enregistrés et dont on n’arrive plus à retrouver les traces aujourd’hui:
Grade + noms et prénoms Originaires de:
– Colonel BANGAMWABO Stanislas
– Capitaine KABERA Jean ……………….. Nkuli Ruhengeri
– S/Lieutenant NSENGIYUMVA Faustin… – –
– S/Lieutenant NSENGIYUMVA Edouard – –
– Sergent NSHIMYIMANA Christophe …. Mabanza Kibuye
– Sergent BIZIYAREMYE ………………….. Karago Gisenyi
– Sergent NZABANDORA ………………….. Kanama Gisenyi
– Caporal NSENGIMANA Antoine ……….. Kanombe Kigali
– Caporal MUGABARIGIRA Casimir ……. Birenga Kibungo
– Caporal NIYONGIRA Caritas ……………. Kayonza Gitarama
– Caporal NSENGIYAREMYE Léonidas .. Tare Kigali
– Caporal IYAMUREMYE Emmanuel …… Mabanza Kibuye
– Caporal GASHINJA Esdras ……………….. Taba Gitarama
– Caporal NSHIMYIMANA Jean de Dieu Kanzenze Kigali-Rural (Prison-
– Caporal NSENGIYUMVA ……………….. Ruhuha Byumba
– Caporal BIZIYAREMYE Servilien ……… Kigombe Ruhengeri
– Caporal MUGABO Innocent ………………. Kinigi Ruhengeri
– Caporal BIRIMINYUNDO Stanislas ……. Nyamugali Ruhengeri
– Caporal NDANYUZWE …………………….. Rubavu Gisenyi
– Caporal KALISA Claude ……………………. Nyarugenge Kigali
– Caporal HABIMANA Célestin …………….. Muganza Butare
– Caporal RWABUHUNGU Pierre …………. Murama Gitarama
– Gendarme BARENGAYABO Augustin…. Mugesera Kibungo
– Gendarme RUDATINYA Emmanuel ……. Nyakinama Ruhengeri
– Gendarme RUGIRA Justin …………………. Muhazi Kibungo
– Gendarme NDONYORI Jean de Dieu ….. Kanama Gisenyi
– Gendarme NIRINGIYIMANA J.Claude… Rusatira Butare
– Gendarme UWINTWARI Prosper ……….. Giciye Gisenyi
– Gendarme MUGIRANEZA Védaste …….. Birenga Kibungo
– Gendarme SEKANABO Jean Baptiste ….. Kibali Byumba
– Gendarme DUSHIMYUMUKIZA J.Claude Mukingo Ruhengeri
– Gendarme NZAMUKWEREKA Thadée .. Satinsyi Gisenyi
– Gendarme KARASIRA Juvénal …………… Mutura Gisenyi
– Gendarme RIBAKARE J.Damascène …… Kanama Ruhengeri
– Gendarme HABIMANA Jean Claude …… Shyanda Butare
– Gendarme UWIHANGANYE Théoneste Rubavu Gisenyi
– Gendarme ISIRAHENDA J.Claude Louis Shyanda Butare
Le Capitaine Jean KABERA, qui a donné ses impressions (qui seraient) semblables à celles de tous les militaires rapatriés, s’est exprimé de la manière suivante: “Le retour est libre, du moins individuellement. La seule embûche resterait plutôt les informations selon lesquelles ceux-là qui rentraient librement subissaient des arrestations arbitraires et des dénonciations abusives, la prison étant leur seul lieu d’accueil”. Quant au rapatriement des militaires ex-FAR, le Capitaine Jean KABERA a dit qu’il n’avait rien à se reprocher, car le souhait de la quasi-totalité des militaires refoulés est d’être intégrés dans l’A.P.R.
Le Capitaine Jean KABERA avait été porté disparu malgré les recherches des organisations et des observateurs des droits de l’homme. Il a été libéré récemment mais il est devenu aveugle complètement. Le Centre ignore encore ce qui lui est arrivé. Que sont devenus les autres alors?
Chapitre V : Persécutions et massacres contre les réservistes ex-FAR et leurs membres de famille:
– Au cours de nos enquêtes dans le pays, un constat s’est imposé: les réservistes, les parents des ex-FAR ont été la cible des unités de tueurs du Front Patriotique Rwandais dans tout le pays. A KIBUYE, CYANGUGU, GITARAMA, KIBUNGO, BYUMBA, RUHENGERI et GISENYI de nombreux cas ont été signalés aux organisations des droits humains.
– Souvent les réservistes étaient exécutés ou portés disparus directement. Parfois ils ont été l’objet de persécutions et de “machinations” avant d’être emprisonnés, battus ou assassinés. Prenons un cas de Mr X… qui avait fait sa carrière dans les FAR de 1967 à 1977. Il fut d’abord évacué au CND à Kimihurura (forteresse du FPR pendant la guerre) et resta dans la zone occupé par FPR. D’après le règlement, on n’est plus considéré comme réserviste après 10 ans, donc il avait cessé de l’être en 1987 et avait remis son “livret militaire” en 1989!
– Suite à une “machination” montée par l’Afandi B… (Chef militaire) à l’aide des veuves rescapées du génocide, Mr X… fut battu le 15/9/94 et faillit mourir chez l’Afandi B… qui avait occupé les biens d’autrui dans la même cellule que sa victime Mr X… L’Association Rwandaise des droits de l’homme (ARDHO) est intervenu pour que cet officier de l’APR soit sanctionné, mais au lieu de cela ce fut Mr X… qui fut d’abord enlevé par des militaires qui gardaient les locaux de l’ancien Palais de Jeunesse à Kimihurura où il fut retrouvé après quelques jours de séquestration. Transférés clandestinement dans le Camp militaire de Kigali le Commandant de ce camp nia l’existence de civils séquestrés dans son Camp. Néanmois l’ARDHO a maintenu la pression jusqu’à ce que Mr X… soit transféré dans la Prison de RILIMA (Bugesera) où sa femme est allé lui rendre visite avec les enquêteurs de l’ARDHO. C’est à cette occasion que nous avons appris l’emprisonnement du Major MBONIGABA à la prison de Rilima, où se trouvaient détenus plusieurs “personnalités et agents de l’Etat”.
Le Centre de Lutte contre l’Impunité et l’Injustice au Rwanda dénonce et condamne ces nombreux crimes imputables aux extrémistes tutsi, qui continue d’achever la destruction d’un pays déjà saigné par les extrémistes hutu en 1994. Il estime et espère qu’un jour une enquête indépendante mettra à jour les différentes responsabilités dans toutes ces crimes contre l’Humanité imputables aux nouveaux détenteurs du “pouvoir occulte” au Rwanda. Ce pouvoir occulte qui paralyse toutes les Institutions de l’Etat Rwandais mises en place par les extrémistes tutsi (qui les contrôlent et les gangrènent complètement grâce à la “terreur militaire”.
Chapitre VI : Cas d’empoisonnement des militaires ex-FAR:
1) Le Major RUTAYISIRE, originaire de Gikongoro est mort à Kigali après avoir absorbé un poison très violent en Novembre 1994. Il avait demandé une autorisation de quitter le “GAKO Reorganisation School”, centre de formation des ex-FAR établi dans l’ancien camp militaire de Gako dans le Bugesera au sud-est du Rwanda. Il voulait venir visiter sa belle soeur, veuve du génocide, résidente à Kigali et pouvoir rencontrer chez elle sa femme qui travaillait à Butare. Il avait d’abord envoyé une lettre à sa femme pour l’inviter à venir le rencontrer à Kigali chez sa petite soeur.
Cette “lettre” n’est jamais arrivée à destination et quand le Major RUTAYISIRE vint à Kigali, il est mort quelques minutes après son arrivée chez sa belle soeur (la petite soeur de sa femme).
2) Déroulement des faits:
– Au moment de prendre sa permission devant le camp militaire de GAKO, une jeep militaire l’a transporté jusqu’à Kigali. Arrivés dans la Capitale Kigali, les militaires de l’APR qui l’avaient pris en charge lui ont proposé d’aller boire un verre et lui ont promis de le conduire après jusqu’à destination (vers le quartier de Nyamirambo où habitait sa belle-soeur)
– Personne ne sait vraiment ce qui s’est passé réellement au moment de cet empoisonnement. Les militaires, qui l’ont conduit à destination comme prévu, ne sont pas entrés dans la maison. C’est pourquoi d’ailleurs la belle soeur du Major RUTAYISIRE était incapable de les reconnaître.
– Quand le Major RUTAYISIRE arriva, tout le monde se mit à table et après il déclara qu’il était fatigué et voulait se reposer. Une chambre pour visiteur lui fut montré. Quelques vingt (20’) minutes après, sa belle-soeur l’entendit (en train de) “râler” très fort. Quand elle ouvrit la porte de la chambre pour visiteur, elle trouva le Major Rutayisire entrain d’agonir avec beaucoup de sang qui lui sortait de la bouche. Il ne pouvait plus parler et il mourut rapidement quelques instants plutard sans avoir pu atteindre l’hôpital.
3) Arrestation et détention de la belle soeur de “feu Major RUTAYISIRE :
– Elle fut arrêtée et détenue à la Brigade de REMERA sous prétexte de passer l’interrogatoire. Mais en réalité il s’agissait de “retirer de la circulation un témoin gênant” de cet assassinat par empoisonnement, pour l’empêcher de parler ou de discuter avec des gens des circonstances mystérieuses de cette mort inopinée.
– Notre équipe d’enquêteurs a rencontré cette femme à la Brigade de REMERA le 2/12/94. Après l’avoir entendu, l’équipe a proposé “sa libération provisoire” d’autant plus que cet empoisonnement ne pouvait lui être attribué. Plusieurs éléments plaidaient en sa faveur:
a) d’une part elle était veuve et comptait beaucoup sur le Major “mari de sa grande soeur” comme son soutien moral; d’autre part il lui aurait été très difficile d’empoisonner quelqu’un qui “passait la nuit chez elle” et qui risquait justement de “mourir sur place”.
b) En examinant ce dossier sous toutes ses formes, cette “jeune veuve” n’avait pas de raison de tuer le mari de sa grande soeur qui “restait son unique soutien moral et matériel” dans un pays où “le militaire représente la protection, le prestige et la prospérité” pour les siens.
– Jusqu’en Janvier 1995, elle n’avait pas encore été libérée malgré son innocence manifeste.
Chapitre VII : Assassinat du Capitaine KARAMBIZI Vincent et ses 2 gardes du corps:
Le 29 avril 1997 aux environs de 19h, six personnes ont été tuées à GASARENDA, commune MUDASOMWA, préfecture GIKONGORO. Les tueurs, qu’on n’a pas pu identifier, étaient armés et en uniforme militaire. Les victimes furent:
– un capitaine appelé KARAMBIZI Vincent;
– ses deux (2) gardes de corps;
– NZABANDORA Jean Baptiste, agronome au P.D.A.G. (Programme de développement Agricole de Gikongoro)
– HABYALIMANA Jean Baptiste, agronome au P.D.A.G. aussi
– ANACLET, Agronome au Projet PASAM.
Les criminels, en tenue militaire, les ont trouvés dans une buvette en train de prendre un verre. Selon les informations diffusées par la Radio Nationale et les propagandistes du régime de Kigali, ce coup aurait été commis par “les infiltrés hutus” (ex-forces armées rwandaises ou interahamwe).
2) Disparition du Major NZABONIMPA Joseph (ex-FAR) rentré et porté disparu à GISENYI au moment où il venait de rentrer au Rwanda par Goma (Nord Kivu) où il s’était caché avec sa famille en attendant l’éloignement des combats dans l’Est du Zaïre.
– Le Major Nzabonimpa Joseph est rentré au Rwanda, par la frontière de Goma avec sa femme et ses trois enfants. Ces derniers seraient dans le camp de transit de NKAMIRA à Gisenyi, tandis que l’on ignore où se trouve le Major.
– En rentrant au Rwanda, il était avec la veuve du Colonel NTIRURASHIRA Anastase, ancien Commandant du Camp militaire de Gitarama, décédé en 1991 (de maladie).
Sa femme MUKANTURO Jeanne et ses trois fils:
– KWISANGA Philbert : 19 ans
– PATRICK ……………..: 17 ans
– REMY ………………….. 15 ans
Ceux-ci sont rentrés en même temps que le Major NZABONIMPA Joseph et seraient tous portés disparus à GISENYI.
Le Centre s’est adressé aux Associations locales pour lancer son “avis de recherche”.
NB: Le Centre ignore si le Capitaine KARAMBIZI Vincent et ses deux gardes du corps étaient tous des hutus ou des tutsis. Il craint toutefois que “ce crime” attribué directement aux infiltrés hutus par Radio Rwanda, ne serve de “détonateur à l’APR” pour mener une répression aveugle et injustifiée contre la population civile dans cette région qui compte encore quelques hutus et qui a perdu la majorité de sa population tutsie.
Pour le Centre, MATATA Joseph, Coordinateur.