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Com094/2006 – Misère organisée par le régime rwandais : Le cas de Gitarama

Le Centre dénonce et condamne la mesure liberticide et arbitraire de la Mairie de Gitarama visant à détruire les bananeraies des habitants le 26/08/2006 pendant les travaux communautaires (UMUGANDA).

Le régime rwandais provoque la mort et la révolte par la faim, la misère organisée et la terreur d’Etat : Le cas de Gitarama

Ce Samedi le 26 août 2006 de 8h à 12h la population de la ville de Gitarama et sa banlieue sera forcée par les autorités rwandaises à détruire leurs plantations de bananeraie. D’après plusieurs réunions organisées par le maire de Gitarama et ses conseillers de secteurs, les habitants de la ville de Gitarama et sa périphérie doivent couper leur bananeraie pendant les travaux communautaires (UMUGANDA) de ce samedi 26 août 2006 et la remplacer par des fleurs ou d’autres plantes que le pouvoir va leur imposer.

            La population de GITARAMA est tout à fait opposée à cette mesure arbitraire qui leur est imposée par la force et qui bafoue leur liberté à s’autoalimenter. Rappelons que depuis plusieurs années une famine ravage le Rwanda où les prix des denrées alimentaires de première nécessité ne cessent d’augmenter. Les habitants de la ville de Gitarama sont très inquiets et soupçonnent que les autorités rwandaises tentent de les affamer et de les déstabiliser sous divers prétextes et sous le couvert des mesures d’une urbanisation qui ne tient pas compte de l’avis de la population. Plusieurs directives et mesures « liberticides et arbitraires » ont été mises en application pour provoquer la population rwandaise et la pousser à la révolte et à la désobéissance civile :
1)     Les propriétaires terriens dont les terrains boisés se trouvent dans les zones proches des vallées ou des marais ont été forcés de couper leurs forêts sous prétexte que le bois consomme beaucoup d’eau et assèche les marais. Cette mesure est en contradiction avec les mesures d’interdiction de couper des arbres sans l’autorisation des autorités communales en vue de protéger l’environnement et favoriser la pluviosité face à une sécheresse qui se répète. Depuis plusieurs mois, les militaires et la milice du FPR, les Local Defence Forces, ont tabassé de nombreux paysans qui ont coupé leur bois. Pour certains les autorisations obtenues ont été ignorées par les militaires ou les miliciens LDF. Les paysans qui ont été forcés de couper leurs forêts (petits bois) craignent que les autorités rwandaises veuillent les exproprier d’une manière hypocrite afin de s’approprier leurs propriétés sous formes d’associations et de projets bidon.
2)     L’interdiction de rouler à vélo dans la route asphaltée et dans la ville de Gitarama ainsi que dans les autres villes du pays comme Butare a mis en colère la population pauvre dont le vélo constituait le seul moyen de déplacement moins coûteux et accessible.
3)     La confiscation des marais du Rwanda et leur transformation « forcée » en champs rizicoles ou autres ont privé les paysans de leurs champs qui leur fournissaient les produits vivriers de première nécessité tels que la patate douce, les haricots, les légumes, etc. Obliger les paysans rwandais à cultiver du riz ou du maïs est une aberration dans la mesure où le riz ne constitue pas leur  nourriture de base. C’est un mépris total vis-à-vis de la population locale qui n’est jamais consultée pour ce genre de décision.
4)     L’interdiction de faire paître le bétail des paysans dans leurs prairies est une mesure « liberticide » qui vise à liquider les petits éleveurs alors que la plupart des terres ne sont plus fertiles surtout dans les préfectures du sud du Rwanda dont fait partie la région de Gitarama. Le manque de fumier de vaches affamera les paysans.
5)     Par exemple depuis la région de Kabuga jusqu’au Mutara et dans la région de Kibungo dans la partie orientale Rwanda, plusieurs chefs militaires et politiques du Front Patriotique Rwandais (FPR) ont confisqué la plupart vallées et des propriétés paysannes dans lesquelles ils ont planté le foin et la nourriture pour leur propre bétail au mépris des propriétaires terriens locaux. Là-bas aussi la colère gronde parmi les paysans. L’expropriation forcée des paysans de leur terre et les mesures liberticides et arbitraires risquent de provoquer la prochaine guerre civile qui opposera les riches et les pauvres du Rwanda et qui sera plus meurtrière que le génocide rwandais.
Le Centre de Lutte contre l’Impunité rappelle aux autorités rwandaises l’esprit et le contenu de l’Article 25 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme ratifiée par le Rwanda :
« Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d’invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté.
La maternité et l’enfance ont droit à une aide et à une assistance spéciale. Tous les enfants, qu’ils soient nés dans le mariage ou hors mariage, jouissent de la même protection sociale ».
Notre Centre estime qu’il est cynique et inacceptable d’obliger la population à détruire leurs plantations sans l’avoir consulté et obtenu sa compréhension et son accord. Les habitants du Rwanda ne sont pas des « soldats » qui sont forcés d’obéir à des ordres qui peuvent provoquer leur disparition physique à court ou à long terme. Les habitants du Rwanda ne doivent pas être considérés comme du bétail qu’on manipule comme on veut. Ils ont un cerveau, ils réfléchissent, ils travaillent dur à nourrir leurs familles. Ils ont aussi un bon sens inné « Bafite umutimanama ». Ce ne sont pas des animaux qu’on conduit à l’abattoir comme on veut. Le gouvernement est incapable de subvenir à leurs besoins, il ne doit pas continuer à prendre des mesures qui affament et appauvrissent les gens. Interdire le vélo et la moto dans les villes est une mesure qui vise à empêcher les pauvres d’accéder à la mobilité la moins chère.
Notre Centre recommande instamment ce qui suit :
–        Que les autorités rwandaises cessent de mépriser et de déposséder les paysans des terres qui les nourrissaient. Qu’ils cessent de prendre des « mesures et des lois liberticides » visant à provoquer la faim et à appauvrir la population rwandaise.
–        Que les autorités rwandaises consultent d’abord la population au lieu de lui imposer des mesures impopulaires visant à provoquer la faim dans une population déjà très pauvre. Que ces autorités se rappellent que l’armée de terreur qu’ils manipulent pour terroriser la population est composée de fils et de filles rwandais et qu’elle n’est pas nécessairement la propriété privée des chefs militaires et politiques du FPR.
–        Que les habitants de Gitarama puissent faire entendre leurs protestations sans subir la terreur d’Etat qui prévaut dans tout le pays et qui muselle le peuple rwandais.

Pour le Centre, MATATA Joseph, Coordinateur.

CLIIR* : Le Centre de Lutte contre l’Impunité et l’Injustice au Rwanda est une association de défense des droits humains basée en Belgique, créée le 18 août 1995. Ses membres sont des militants des droits humains de longue date. Certains ont été actifs au sein d’associations rwandaises de défense des droits humains et ont participé à l’enquête CLADHO/Kanyarwanda sur le génocide de 1994. Lorsqu’ils ont commencé à enquêter sur les crimes du régime rwandais actuel, ils ont subi des menaces et ont été contraints de s’exiler à l’étranger où ils poursuivent leur engagement en faveur des droits humains.