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QUINZAINE DE LUTTE CONTRE LA CULTURE DU MENSONGE, DE L’INJUSTICE ET DE L’IMPUNITÉ AU RWANDA (#4 Assassinats et Expulsions des Témoins gênants occidentaux)

Les meurtriers du FPR se sont débarrassés de manière systématique voire définitive tous les témoins oculaires occidentaux qui auraient pu mettre à nu leurs actes macabres

QUINZAINE DE LUTTE CONTRE LA CULTURE DU MENSONGE, DE L’INJUSTICE ET DE L’IMPUNITE AU RWANDA

"Le mensonge donne des fleurs, jamais des fruits"

Le 05 décembre 2014

#4 Assassinats et Expulsions des témoins gênants occidentaux
Les occidentaux en poste au Rwanda ont fort gêné les meurtriers et autres tortionnaires du FPR qui ne pouvaient plus dissimuler leurs actes macabres. Par leur présence, ils ont contribué à sauver de nombreuses vies humaines. Dans un livre publié par un chercheur Suisse, Grégoire DURUZ à Yvelin édition en avril 2014 et intitulé « Par-delà le Génocide », deux survivants et anciens détenus Hutus racontent leur calvaire et comment ils doivent leur survie à des visiteurs blancs, ces témoins gênants, qui visitaient les cachots et les prisons mouroirs du Rwanda en 1995 :

Domitille, 56 ans, raconte à la page 132 : (…) Je racontais tout cela au délégué du CICR (Comité  International de la Croix Rouge). Nous parlions en français alors que les militaires ne comprenaient que l’anglais. A un moment, trois d’entre eux intervinrent pour me demander ce que je décrivais avec tant de détails au « Muzungu ». J’avais également rempli en kinyarwanda un petit formulaire de correspondance pour ma sœur dans lequel je la priais de ne jamais venir me voir ici à Butare, étant donné la haine que plusieurs familles vouaient à la nôtre. Les militaires parcoururent le petit mot et me menacèrent : « Ou tu manges cette feuille, ou tu la déchires ! ». C’est alors que le délégué (CICR) prit la feuille, la chiffonna et la mit dans sa poche comme pour clore l’épisode. Je pense qu’il a dû en fait garder mon message et tout faire pour le transmettre à ma sœur. (…).

Védaste, 52 ans, raconte pages 147 et 148 : « Dans mon cas, c’est l’intervention de la Croix-Rouge qui m’a peut-être sauvé la vie. La Croix Rouge avait été alertée par des contacts. Je me souviens que nous avons entendu des voix de Blancs alors que nous étions enfermés dans notre container, et nous nous sommes mis à crier. La délégation en visite – composé de deux Blancs et de deux Africains non Rwandais – demanda alors à rencontrer les personnes qui se trouvaient dans le container. Nos gardes ont ouvert et les visiteurs ont pris le temps de dialoguer avec nous. Ils nous demandèrent les raisons de notre détention : nous leur répondîmes que nous n’en savions rien. Ils interrogèrent nos gardiens aussi. A la suite de cette intervention, certains prisonniers furent libérés sur-le-champ, d’autres déplacés dans un cachot ou sur un autre site encore. En ce qui me concerne, je fus réinstallé dans le container jusqu’à ce qu’une deuxième visite d’étrangers survienne le lendemain. Cette fois, les employés de la Croix-Rouge étaient accompagnés de représentants du HCR (Haut Commissariat aux Réfugiés des Nations Unies) (…) ».

Réaction des militaires rwandais : De 1995 à 1997, plusieurs membres du CICR (Comité International de la Croix-Rouge) avaient été attaqués dans leur résidence à Kimihurura (Mairie de la Ville de Kigali) par des militaires à la recherche de Belges et de Français, parce qu’ils visitaient les prisons et limitaient la disparition des détenus.

A la page 135 du livre, Médecins Sans Frontières pointait déjà du doigt la négligence des nouvelles autorités rwandaises en 1995: « S’il était possible de croire un temps le pouvoir de Kigali quand il invoquait le manque de moyens pour expliquer l’inexistence du pouvoir judiciaire, on peut émettre aujourd’hui de réels doutes sur les fondements d’une telle argumentation. Il y a aujourd’hui bel et bien paralysie volontaire de tout le système judiciaire. (…) Cette paralysie se manifeste par des pressions énormes exercées sur les juges existants, un blocage au niveau de l’instruction des dossiers et de toute procédure en général. » (Médecins Sans Frontières (1995b) : Dossier Rwanda).

Pour mieux massacrer, torturer, opérer des enlèvements et emprisonner arbitrairement sans témoins gênants, le Gouvernement rwandais par la voix du Ministère de la Réhabilitation et de l’Intégration Sociale a décidé, le 6 décembre 1995, d’interdire sur son territoire les activités de 38 organisations non gouvernementales (ONG) internationales qui opéraient au Rwanda. Celles-ci se sont vues reprocher pour certaines le manque de performance, le manque de programme clair pour d’autres, et enfin la négligence des directives gouvernementales. Mais, en réalité, certaines ONG australiennes furent expulsées parce que les casques bleus australiens avaient rapporté et dénoncé le massacre de 8000 déplacés de guerre Hutu à Kibeho dans les médias.

Il s’agit des ONG suivantes : AIDAB Australia, Austrian Relief Program (ARP), Care Australia. Plusieurs ONG françaises aussi furent massivement expulsées du Rwanda à cette date.

Grâce au Mensonge d’Etat, le gouvernement rwandais a trouvé de nombreux et variés prétextes pour assassiner les témoins oculaires occidentaux. Il s’agit de plusieurs prêtres catholiques occidentaux et les coopérants humanitaires Européens qui vivaient auprès des paysans dans des paroisses un peu partout dans le pays. L’assassinat des missionnaires canadiens fut précédé ou suivi par l’assassinat de neuf (9) missionnaires et coopérants humanitaires espagnols à partir d’avril 1994 avec l’assassin du Père Joacquim VALLMAJO SALA jusqu’en 2000 avec l’assassinat du père Isidro UZCUDUN Pouso.

Au total, les religieux espagnols catholiques assassinés par les militaires tutsis du FPR (Front Patriotique Rwandais) sont :

  • Le Père Joacquim VALLMAJO SALA né le 21 mars 1941 et arrivé au Rwanda le 27 juin 1965 et tué le 26 avril 1994 à Byumba au nord-est du Rwanda
  •  Le Père Isidro UZCUDUN Pouso né le 24 janvier 1931 et tué à Mugina le 10 juin 2000.
  • Les Frères maristes tués par le FPR à Nyamirangwe (Congo) le 31 octobre 1996 sont :  
    • §  Servando MAYOR Garcia né le 20 juillet 1952 et arrivé au Rwanda en 1995
    • §   Julio RODRIGUEZ Jorge né le 20 octobre 1956 (14 ans dans la région)
    • §   Miguel Angel ISLA LUCIO né le 8 mars 1943
    • §   Fernando DE LA FUENTE né le 16 décembre 1943

Au total, trois coopérants espagnols, travaillant pour l’ONG  MEDECINS DU MONDE,  furent assassinés par le FPR le 18 janvier 1997 à Ruhengeri (nord-ouest du Rwanda). Il s’agit de :

  • Maria FLORS SIRERA FORTUNY (33 ans) né le 25 avril 1963
  • Manuel MADRAZO OSUNA (42 ans) né le 14 septembre 1954
  • Luis VALTUENA GALLEGO (30 ans) né le 7 février 1966 

Les Pères canadiens tués par le FPR : 

  • Le Père Claude SIMARD tué le 17/10/1994 était Curé de la paroisse Ruyenzi à Butare
  • Le Père Guy PINARD, Curé de la paroisse Kampanga a été tué en pleine messe le 2 février 1997 à Ruhengeri 

Le Père croate Curic VIJEKO fut tué le 31/01/1998 à Kigali par un militaire FPR. Il était économe général du diocèse de Kabgayi à Gitarama.

L’objectif des tueurs était de contraindre tous les témoins gênants étrangers de quitter les campagnes et les villages rwandais au plus vite. Dans cet incident, un américain grièvement blessé a été amputé d’une jambe et soigné à Nairobi. Il avait été épargné par les malfaiteurs car il avait eu la présence d’esprit de crier qu’il était citoyen américain! En effet, pour mieux déclencher la « fameuse guerre civile des infiltrés HUTU » dans le nord-ouest du Rwanda, il fallait pousser tous les occidentaux à se replier et à se concentrer dans la capitale rwandaise, KIGALI. La junte militaire réussit ainsi à chasser des provinces les ONG occidentaux par l’assassinat des trois espagnols et les attaques répétées contre le personnel humanitaire Européen.

De 1995 à 1997, plusieurs membres du CICR (Comité International de la Croix-Rouge) avaient été attaqués dans leur résidence à Kimihurura (Mairie de la Ville de Kigali) par des militaires à la recherche de Belges et de Français, parce qu’ils visitaient les prisons et limitaient la disparition des détenus. Après avoir vérifié leur nationalité, ils les avaient ligotés et brutalisés pendant deux heures avant de s’emparer de l’argent et des objets de valeur. Ils reprochaient au CICR sa surveillance des prisons-mouroirs et son appui dans la  recherche des personnes disparues.

Dans toute sa stratégie, la junte militaire de Kagame recoure au mensonge et à l’intoxication. Le cas d’une attaque médiatique contre le CICIR est une illustration criante de cette stratégie. Prenons un exemple de « diffamation » et de « chantage » que le Directeur de la prison de Rilima (au Bugesera), Mr BIRAJE Sylvestre, a tenté d’exercer au personnel expatrié du Comité International de la Croix Rouge (CICR) dans sa lettre au Ministre de la Justice du 12/12/96. Ce n’était ni la première, ni la dernière fois que le CICR subissait des attaques injustifiées de la part du “pouvoir occulte” des extrémistes tutsis. Ceux-ci reprochent toujours au CICR et aux autres organisations humanitaires leurs activités visant à améliorer les conditions de détenus et d’autres populations sinistrées, considérés comme des ennemis à leur régime actuel. (Voir le détail ICI).

Mars 1995 : Trois ONG belges de développement (COOPIBO, Iles de Paix et S0S-Faim) très proches et principaux bailleurs de fonds du  Mouvement coopératif paysan ont été expulsés afin d’appauvrir la paysannerie et anéantir le « Mouvement Coopératif » déjà initié à la démocratie et aux droits humains. Les membres des coopératives et les paysans progressistes, pourchassés par le régime actuel, avaient suivi de nombreux séminaires de formation et de sensibilisation aux droits humains et à la démocratie organisés par le Centre IWACU (ONG d’appui au Mouvement coopérative) entre 1991 et 1994.

Au cours du 1er semestre 1995 : une campagne orchestrée par les autorités de Kigali a visé directement la communauté étrangère.

Décembre 1995 : Juste après l’exil d’une grande partie de la population, les nouveaux chefs de Kigali ont voulu faire des purges à l’intérieur du pays. Ils devaient limiter au maximum la curiosité des témoins étrangers qui pourraient dénoncer les exactions du nouveau régime. En dissolvant les ONG présentes sur terrain, ils voulaient ainsi limiter au strict minimum le nombre des étrangers qui visitent les campagnes rwandaises pour isoler les paysans rwandais (à majorité hutue). Aussi, en préparation des tueries dans les camps de réfugiés dans la région du Kivu, les étrangers en si grand nombre pourraient facilement alerter la communauté internationale de la catastrophe humanitaire en perspective. 

Le Gouvernement rwandais par la voix du Ministère de la Réhabilitation et de l’Intégration Sociale a décidé, le 6 décembre 1995, d’interdire sur son territoire les activités de 38 organisations non gouvernementales (ONG) internationales qui opéraient au Rwanda. Celles-ci se sont vues reprocher pour certaines le manque de performance, le manque de programme clair pour d’autres, et enfin la négligence des directives gouvernementales. Les 38 ONG humanitaires et de développement expulsées et dont les activités étaient interdites au Rwanda  sont les suivantes :

  1. AICF (Action Internationale contre la Faim) France 
  2. Africa  Center for Treatment and Rehabilitation -Torture victimes
  3. AIDAB Australia
  4. American for Africa Adoption (A.A.A.)
  5. Association Française de Sauvegarde de l’Enfance et Adolescence
  6. Association pour l’Action Humanitaire (AAH) 
  7. Austrian Relief Program (ARP) 
  8. Les enfants avant tout-Action 
  9. Première Urgence 
  10. Safe Harbour International Relief 
  11. Terre des Hommes 
  12. APORWA 
  13. Médecins Sans Frontières France (MSF-France) 
  14. ORA International 
  15. SASO : Sustainble Agriculture Support for Orphans 
  16. Abundant Life International 
  17. Association Française des Volontaires du Progrès 
  18. Joint Relief Rehabilitation Service 
  19. ARDICI 
  20. Bureau Conseil Appui aux ONG de l’Afrique Centrale (BCA) 
  21. Hôpital sans Frontières (HSP) 
  22. APACOR
  23. ATOL
  24. Care Australia 
  25. CIDSE : Coopération Internationale pour le Développement et la Solidarité 
  26. ECOTERRA International 
  27. Equilibre 
  28. Fraternité notre Dame 
  29. Médecins du Monde (MDM)
  30. Médecins Sans Frontières SUISSE 
  31. Partage avec les enfants du monde 
  32. Triangle Génération Humanitaire 
  33. East Africa Development Services/Rwanda 
  34. RAFAD 
  35. SOS RACISME
  36. CUAMM 
  37. Inter SOS 
  38. Terre Sans Frontières

Les activités de certaines  ONG ont été  momentanément suspendues :

1.      Aide et Action 

2.      Associazione Solidarieta’per lo Sviluppo 

3.      Christian Reformed World Relief Committee (CRWRC) 

4.      CESAL

5.      DELIPRO

6.      Food for the Hungry

7.      Initiative Humanitaire Africaine (IHA)

8.      Johanniter-Unfallhilfe e.v.

9.      Revival and Restoration Ministries-Rwanda

10.  Christian Unity Fellowship

11.  Bornefonden Rwanda

12.  Croix Rouge de Belgique

13.  Sentinelles

14.  ADRA : Adventist Development Relief Agency

15.  Espoir Sans Frontières

16.  British Direct Aid

17.  Friends in the West

Janvier 1996 : Trois enquêteurs du TPIR avaient été agressés par des militaires rwandais. Les responsables militaires et politiques ont dû s’excuser auprès de l’ONU.

Mars 1996 : La Mission des Nations Unies au Rwanda (MINUAR II) a été contrainte de cesser ses activités au Rwanda. Sa station de Radio a été fermée aussi. Un journaliste de cette Radio de l’ONU, Monsieur Manassé MUGABO, fut porté disparu jusqu’à ce jour.

CONCLUSION :

Le régime rwandais est devenu expert en matière de camouflages et de dénégations. Quand il ne parvient pas à contrôler les recherches sur le terrain, le gouvernement rwandais exerce une pression rarement vue sur les instances onusiennes qui s’apprêtent à rendre public des éléments d’enquêtes compromettant l’ « image de marque » qu’elle s’est toute fabriquée.

L’après guerre de l’information menée par les autorités rwandaises pour contrôler l’image qui est donnée d’elles à l’échelle internationale est connue de tout observateur attentif des artifices rhétoriques et intimidations grossières régulièrement déployés à l’encontre d’organisations locales ou étrangères, chercheurs indépendants, bailleurs de fonds ou institutions onusiennes. Ces manœuvres du FPR sont documentées par de nombreux autres écrits[1].

 

Fait à Bruxelles, le 05/12/2014

Joseph MATATA, Coordinateur du CLIIR

 


[1] Voir entre autres : POTTIER, Johann (2002) : Re-imagining Rwanda. Conflict, Survival and Disinformation in the Late Twentieth Century ; MUSABYIMANA Gaspard (2003) : La vraie nature du FPR/APR d’Ouganda au Rwanda ; Péan Pierre (2005) : Noir fureurs, blancs menteurs ; INGLAERE Bert (2007) : Does The Truth Pass across the Fire without Burning ?; INGELAERE Bert (2010) : « Do We Understand Life After Genocide ? Center and Periphery in the Construction of Knowedge in Rwanda » ; REYNTJENS Filip (2011) : Constructing the Truth, Dealing with Dissent, Domesticating the World : Governance in Post-Genocide Rwanda.