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1996 - 2000 COMMUNIQUES Ruhengeri - Gisenyi TOUS Violences sur la population

Com004/1996 : Poursuite des massacres de civils dans le Nord par l’Armée du FPR

Le Centre dénonce et condamne les massacres planifiés et systématiques par l’Armée sur des dizaines de civils hutu sans armes dans les préfectures de GISENYI et RUHENGERI, sous prétexte de rechercher des “infiltrés hutus”.

L’Armée Patriotique Rwandaise (APR) continue de massacrer des civils dans le Nrd du Rwanda en toute impunité 

Le Centre de Lutte contre l’Impunité et l’Injustice au Rwanda dénonce et condamne les massacres planifiés et systématiques perpétrés par l’Armée sur des dizaines de civils hutu originaires des communes NYAMUTERA, NYAKINAMA et NKULI de la Préfecture de Ruhengeri au Nord du Rwanda. Depuis le début du mois de Juillet 1996, l’Armée Patriotique Rwandaise (à majorité tutsi) a intensifié ses opérations meurtrières et criminelles contre des populations civiles et sans armes dans les préfectures de GISENYI et RUHENGERI, sous prétexte de rechercher des “éventuels éléments infiltrés hutus”.
            En date du 6 août 1996, à l’aube, les militaires de l’APR ont encerclé quelques secteurs des communes NYAMUTERA, NYAKINAMA et NKULI dans le but, disaient-ils, de rechercher les infiltrés hutus et leurs complices. Au cours de cette opération de “ratissage”, les soldats de l’APR ont massacré aveuglement plusieurs civils innocents qui n’ont pas été identifiés comme des infiltrés ou leurs complices.
            D’après la lettre n° 265/05.09.01/4 du Bourgmestre de la Commune NYAMUTERA Mr BUGINGO, adressée au Préfet de la Préfecture de RUHENGERI en date du 8 août 1996, il est difficile de connaître le nombre exact des victimes de ce ratissage aveugle, qui a eu lieu à l’insu et en l’absence des autorités administratives locales. Ces incidents ont eu lieu au moment où tous les conseillers communaux de la Préfecture de Ruhengeri participaient au Séminaire de formation organisé par le Préfet au chef lieu de préfecture.
            Le nombre exact des victimes n’est pas connu jusqu’à présent, car la population a eu peur de fouiller dans tous les endroits où seraient les corps des victimes. Mais d’après les informations fournies par le Bourgmestre de la commune NYAMUTERA, les victimes dépassent de loin une cinquantaine. Parmi les victimes identifiées, on peut citer :
Secteur MUKIRANGWE:
Cellule Karambo:                            Cellule Nyakigezi:                          Cellule Musenyi:
1. HABALI Jean de la croix           1. KANYARWANDA Juvénal*    1. AKIMANIZANYE Vincent
2. NDIKURYAYO Wellars            2. NDORIBYUBU                           2. GATEMBA Amiel
3. Mpabatanyurwa Bernard           3. Mbuzamamenero Alexandre*
4. Seruhungo Déo Ntambara         4. GIHANA                                       Cellule Mukirangwe:
5. SEBIKWARE                               5. HABIMANA Papias                    1. GASANABAGABO
6. SEKABANZA
Cellule Bihe:                                    Cellule Karambi:
1. Fils BARYORUBUSA                1. NTANCUNGU                             2. NGIRUWONSANGA
                                                           3. Bararwerekana Antoine             4. BAVUGAMENSHI
Secteur RUGERA:                         Secteur NYARUTEMBE:             Secteur MURAMA:
1. UWIMANA Cléophas                1. BAVUGA                                     1. Nyibiyunguye Tharcisse
2. HAKUZIMANA Faustin            2. Muhayimpundu Sayidi                                 (cellule Bukenge)
3. Rukeribuga Léodomir                3. BIRIRABAGABO
4. Ndagijimana Fulgence               4. NDAYAMBAJE                          Secteur MARANGARA:
5. Musemakweri (élève de Shyira)             5. KWIZERA                                    1. NZABIHIMANA
6. NTAKABUKUYE Mohamed                                                                   (cellule Nyamyumba
SECTEUR  KAGERI:
1. SEMARYOSHYA         6. BACAMWABO            11. MUREGO                    16. BIZIMANA
2. MATATA                      7. ZIRIMWABAGABO    12. BIDAKWIYE              17. BALIRA
3. NSABIYERA                 8. HABARUREMA           13. BASHAKAZI              18. BIRIKANO
4. JONASI                          9. NTAGANDA                 14. IRANDEBA                 19. MVUYEKURE
5. RWATANGABO          10. BARIHONGA             15. HABARUREMA        20. NGOMIRENGA
*Kanyarwanda Juv. était Percepteur des impôts; Mbuzamamenero était Préfet à l’Ecole Second.de Kagogo.
Quatre victimes sont des membres de la famille du Député MANIRAGUHA Jacques (du Parti MDR).
Les autres victimes ne sont pas encore connues car certains endroits sont inaccessibles. Parmi les victimes, on remarque un grand nombre d’ETUDIANTS qui étaient en vacances.
            Les autorités civiles de la région n’ont pas du tout apprécié la réaction des autorités militaires qui ont organisé ces opérations meurtrières à leur insu et en l’absence des Conseillers de secteurs. L’ordre de tirer sur des innocents a été donné par le Colonel NGOGA, actuel commandant militaire de cette région. Le Centre rappelle que c’est ce même Colonel NGOGA qui a organisé les précédentes opérations meurtrières contre les populations civiles sans armes des communes KARAGO et GICIYE (en préfecture Gisenyi) où plus d’une cinquantaine de civils innocents ont perdu la vie.
            Après ces massacres planifiés et aveugles, toute personne de sexe masculin âgé de 15 ans et plus a été rassemblée sur la colline de MURAMA. Les militaires de l’APR faisaient le triage disant que certains étaient des miliciens. Sur ce point, le Bourgmestre de Nyamutera se demandait les critères sur lesquels l’APR se basait pour identifier des “interahamwe”.
Ce rassemblement avait aussi comme objectif de contraindre les hommes à dénoncer les complices des infiltrés parmi eux. Des dispositions de torture physique et morale ont été prises (comme peu avant les massacres de KIBEHO en Avril 1995) de façon que cette population ne recevait ni l’eau ni la nourriture. Elle ne pouvait pas bouger même pour faire ses besoins à la toilette. Cette situation a duré de mardi 6/8 jusqu’à mercredi 7/8/96 à 17h30.
            Après ce triage arbitraire et aveugle, plus de quatre-vingts (80) personnes ont été arrêtées et conduites vers une destination inconnue par les militaires de l’APR. Les membres rescapés de leurs familles, les autorités civiles de ces communes ainsi que les Associations locales des droits humains ignorent leur sort jusqu’à présent.
            Le Centre de Lutte contre l’Impunité et l’Injustice au Rwanda rappelle que plusieurs organisations internationales et nationales ont toujours dénoncé et condamné les massacres de civils innocents par l’Armée Patriotique Rwandaise qui considère la population rwandaise (à majorité hutu) comme “son principal ennemi”:
1) Le 26 juillet 1996, HUMAN RIGHTS WATCH et la FEDERATION Internationale des Droits de l’Homme (FIDH) ont condamné les massacres de 132 civils sans armes par des soldats de l’APR durant des opérations militaires dans les communes RAMBA, GICIYE, KARAGO (préfecture Gisenyi), NYAMUTERA (Ruhengeri) et RUSHASHI (Kigali-rural) entre les 2 et 13 juillet 1996. Les deux organisations ont condamné en outre l’assassinat de 17 personnes les 7 et 11 juillet parmi lesquelles se trouvent des autorités locales des communes Rushashi, Tare et Nyabikenke. Officiellement attribuées aux infiltrés hutus, ces attaques semblent avoir été menées par des soldats de l’APR qui avait déjà massacré aveuglement 9 civils le 2/7/96 dans le secteur GATARE (Rushashi) sous prétexte de chercher les “infiltrés hutu”!
2) Le 12 août 96, AMNESTY INTERNATIONAL (AI) a publié un nouveau rapport sur les exécutions extrajudiciaires et autres massacres commis au Rwanda depuis le début de 1996. Cette organisation dénonce et condamne les massacres et autres tueries de l’APR et des “groupes d’opposition” qui ont fait plus de 650 morts civils sans armes(dont des femmes et des enfants) entre Avril et Juillet 1996. Ce rapport donne entre autres quelques détails suivants:
– le 5, 9 et 10 juillet: vingt-deux (22) personnes ont été tuées en commune Karago (Gisenyi) dans les opérations de ratissage de l’Armée Patriotique Rwandaise (APR);
– le 9 et 10/7/96: plus de Cent personnes (dont les enfants de 10 ans) ont été massacrées par l’APR en communes GICIYE et NYAMUTERA sous prétexte qu’ils seraient des infiltrés;
– le 13 juillet: Quarante sept (47) personnes ont été tuées en commune RAMBA (Gisenyi).
            Le Centre de Lutte contre l’Impunité et l’Injustice au Rwanda, en collaboration avec les associations nationales et internationales continue d’enquêter sur ces massacres de l’APR et vous tiendra au courant des derniers développements de ces tueries planifiées au Rwanda.
Pour le Centre, MATATA Joseph, Coordinateur